EDUCATION

Sorties scolaires, mode d’emploi

HD-397---sorties-louvre-AFPMalgré les contraintes d’organisation qu’elles impliquent, les sorties scolaires restent prisées des enseignants. De nouvelles formes de voyages voient même le jour.

 

Les enseignants le savent mieux qui quiconque, les voyages forment la jeunesse. Qu’elles durent une matinée ou une semaine, ces sorties constituent un outil pédagogique inégalable. « J’ai organisé un certain nombre de voyages scolaires, notamment en Irlande et en Ecosse, et je n’en retire que du positif, se souvient Cédric Garrigou, professeur d’anglais dans un collège REP (réseau d’éducation prioritaire) de Gironde et membre du syndicat SE-UNSA. Je les juge indispensables, surtout pour les élèves de REP. Plus que le fait d’apprendre la langue, un voyage à l’étranger permet de sortir les élèves de leur cadre habituel et donne du sens aux apprentissages. Après chaque voyage, j’ai constaté que le niveau des productions s’améliorait nettement et il n’était pas rare que des élèves en difficulté jusque-là se révèlent ».

Si les enseignants peuvent réserver séparément le transport, l’hébergement et les activités, la plupart font appel à des organismes spécialisés. Des dizaines d’associations et d’agences privées proposent des séjours clés en main, en France et à l’étranger. A côté des classiques séjours linguistiques, sportifs ou culturels et des traditionnelles classes de découverte à la mer ou à la montagne, de plus en plus de voyages en lien avec les thématiques du moment (protection de l’environnement notamment) figurent au catalogue. Ainsi l’agence Double-sens organise des voyages scolaires solidaires et éthiques à l’autre bout du monde (classe verte au Sri Lanka, chantier de construction au Cambodge…). Ethic Etapes propose au choix de se plonger dans le Moyen-Age à travers l’histoire de la ville de Poitiers ou de sensibiliser les élèves à la protection du littoral sur les plages de Saint-Malo. « Nous proposons aussi des thématiques de plus en plus pointues, même si notre séjour-phare reste invariablement notre voyage lecture-écriture-édition, explique Dominique Lissonde, directrice générale adjointe de l’association OVAL qui organise des voyages scolaires depuis 30 ans. Même si les séjours sont plus courts et plus denses qu’avant, la demande est toujours importante car les enseignants ont conscience qu’un voyage scolaire est une occasion unique de travailler différemment et que les élèves apprennent mieux quand ils découvrent et expérimentent les choses sur le terrain plutôt que dans les livres ».

Si les organismes sont là en soutien, l’investissement de l’enseignant organisateur doit être total. « Il faut convaincre les parents de laisser partir leur enfant, trouver des collègues qui veuillent bien nous accompagner, faire en sorte que ceux qui restent ne donnent pas de devoirs cette semaine-là, explique Cédric Garrigou. Il faut surtout être prêt à prendre la responsabilité de 50 élèves et à se démener pour trouver les financements nécessaires. L’année dernière, j’ai passé des heures à essayer de trouver des mécènes, sans y parvenir au final. »

 

Une législation différente selon la durée

Chaque sortie doit surtout respecter scrupuleusement la procédure mise en place par l’Education nationale. Toutes celles qui ne dépassent pas les horaires habituels des cours et n’englobent pas la pause déjeuner (piscine, bibliothèque, musée, balade, etc.) sont obligatoires. Les enseignants n’ont donc pas d’autorisation à demander aux parents. Ils doivent néanmoins les informer du lieu, du jour, des horaires de départ et de retour ainsi que du ou des modes de transport empruntés. Aucune participation financière ne peut leur être demandée.

Dès lors que les élèves sont amenés à déjeuner à l’extérieur ou que les heures de départ ou de retour dépassent les horaires habituels, la sortie est considérée comme facultative. S’ils souhaitent que leur enfant y participe, les parents doivent donner leur accord écrit et une participation financière peut leur être demandée, à condition qu’elle soit modérée et qu’elle n’empêche aucun enfant d’y participer.

Lorsque la sortie intègre une nuitée, on parle alors de « voyage scolaire ». Dans ce cas, l’enseignant a l’obligation d’organiser une réunion préalable au cours de laquelle il donne aux parents des informations sur le lieu d’hébergement, sur les activités pratiquées, sur les moyens de transport empruntés et sur les formalités nécessaires. Il devra, avant le départ, avoir récupéré les autorisations de participation signées des parents, les autorisations de sortie de territoire en cas de séjour à l’étranger (l’autorisation d’un seul parent suffit sauf désaccord avéré entre eux) ainsi que les fiches sanitaires de liaison sur lesquelles figurent les informations importantes liées à la santé de l’enfant. Cette réunion est aussi l’occasion de répondre aux questions des parents et de les impliquer dans le projet. Pour Dominique Lissonde de l’association OVAL, « cette phase est importante car beaucoup de parents sont inquiets à l’idée de se séparer de leur enfant. Il est souvent utile de les rassurer ».

 

HD-397---sorties-3Un taux d’encadrement à respecter

L’enseignant organisateur doit enfin parvenir à réunir suffisamment d’adultes volontaires pour encadrer le groupe durant la sortie. Au-delà de 16 élèves de maternelle, il doit impérativement être accompagné d’un adulte supplémentaire par tranche de 8 élèves. En élémentaire, ce taux monte à un adulte par tranche de 15 élèves à partir de 31 enfants pour les sorties sans nuitée et par tranche de 10 élèves à partir de 21 enfants pour les sorties avec nuitée. Les encadrants peuvent être des collègues de l’enseignant qui organise, des aides-éducateurs, des Atsem ou des parents d’élèves.

Lorsque les élèves sont divisés, chaque groupe doit être sous la surveillance d’au moins un adulte. L’enseignant gère alors l’un d’entre d’eux et informe les autres encadrants des modalités d’organisation de la sortie et des règles de sécurité à respecter.

La législation prévoit tout de même qu’un enseignant puisse encadrer seul sa classe dès lors que la sortie s’effectue à pied ou en car spécialement affrété pour la circonstance, qu’elle se déroule près de l’établissement et qu’elle s’étale sur moins d’une demi-journée. Cette souplesse n’est toutefois accordée que pour les classes d’élémentaire. En maternelle, un deuxième encadrant reste indispensable.

Qu’elles soient facultatives ou obligatoires, qu’elles comprennent ou non une ou plusieurs nuitées, dans le secondaire, les sorties scolaires sont toujours soumises à l’accord du chef d’établissement qui doit s’assurer que les objectifs poursuivis, l’organisation et le mode de financement soient en adéquation avec les orientations décidées par le conseil d’administration. Dans le primaire, c’est le directeur qui signe l’autorisation de sortie à la journée. En revanche, dès lors qu’une nuitée est prévue, le dossier doit obligatoirement passer entre les mains de l’inspecteur de circonscription puis dans celles du directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen) qui donne son autorisation en s’appuyant sur les éléments d’organisation qui lui ont été transmis et sur l’intérêt pédagogique du voyage. Aussi contraignantes soient-elles, toutes ces procédures existent pour limiter au maximum les risques liés à la sécurité des élèves… et rassurer au maximum les parents !

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POINT DE VUE

Alain Rei, directeur de l’école de Roquefort-la-Bédoule (13) et président du Groupement de défense des idées des directeurs (GDID)

« Dans mon établissement, je n’autorise les sorties scolaires que si elles respectent deux critères. Tout d’abord, leur coût doit être raisonnable pour les familles. C’est un principe important, même s’il n’est pas toujours évident à atteindre, notamment dans les zones rurales où les coûts de transport sont très élevés. Heureusement que nous bénéficions d’une subvention de la commune et que les parents d’élèves nous aident à récolter des fonds. La coopérative peut aussi aider les familles en difficulté. Ensuite, il faut que la sortie s’inscrive dans le projet d’école et présente un réel intérêt pédagogique. L’école n’est pas là pour emmener les enfants dans les parcs d’attraction.

Une fois ces critères remplis et l’accord de principe obtenu, l’enseignant doit réussir à mobiliser suffisamment d’adultes pour assurer l’encadrement et définir le programme en tenant compte des éventuelles restrictions. Le plan Vigipirate nous a parfois empêchés de nous rendre dans certains lieux ou d’emprunter les transports en commun. Chaque sortie demande une énergie folle, mais si nous continuons à en organiser, c’est parce que leur intérêt est évident. C’est le cas notamment pour la classe transplantée astronomie que nous organisons chaque année en octobre. Elle permet à coup sûr de souder le groupe classe et d’insuffler une dynamique positive sur les cours de sciences pour le reste de l’année. »

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A SAVOIR

Choisir la bonne assurance

Lorsque la sortie est obligatoire, aucune assurance supplémentaire n’est demandée. En revanche, pour que leur enfant puisse prendre part à une sortie facultative, les parents doivent impérativement fournir un document attestant que leur enfant est couvert par une assurance responsabilité civile et par une assurance individuelle accidents corporels. Il est aussi recommandé aux parents encadrants de souscrire à ces assurances.

Pour en savoir plus – et faire le bon choix ! – reportez-vous à notre article sur les assurances scolaires.

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ZOOM

Des collégiens de Vendée en route pour Madagascar

Cela faisait trois ans qu’ils l’espéraient. Cet été, le rêve est devenu réalité. En août, une quinzaine d’élèves du collège Stéphane Biobetta d’Aubigny (85) se sont envolés pour Ratapenjika, un petit village de l’archipel des Mitsio au nord-ouest de Madagascar. Là-bas, ils sont partis à la rencontre des habitants et à la découverte de l’île. Ils ont même participé à la construction d’un four solaire.

Ce voyage scolaire inédit est l’aboutissement d’un long travail. Depuis septembre 2014, ces élèves de cinquième, quatrième et troisième s’investissaient au sein du club Malagasy, créé à l’initiative de trois enseignants. Chaque jeudi midi pendant 1 heure, les élèves se retrouvaient pour réfléchir à la manière dont ils pouvaient récolter des fonds pour aider l’association Vazalala qui construit des écoles, des dispensaires et des puits dans cette région isolée du monde. Les ventes d’objets, les stands de jeu à la kermesse et surtout les deux courses solidaires qu’ils ont organisés ont permis de récolter plusieurs milliers d’euros. Une campagne de financement participatif les a aidés à payer une partie de leur voyage. « Après avoir travaillé pendant trois ans sur ce projet, nous voulions nous rendre sur place pour découvrir le fruit de nos efforts et aider directement sur place », expliquent-ils.

 

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