EDUCATION

L’internat, un cadre vers l’autonomie et la réussite

HD-406---internat-AFP-OKEloignement géographique, recherche d’un cadre de scolarité structuré, études spécifiques… Les raisons de choisir un internat au collège ou au lycée sont multiples. Quels sont les avantages et inconvénients de cette solution ? Comment s’organise la vie des élèves ? Quelle est l’offre des établissements ? Réponses en témoignages.

 

 

« Si tu continues comme ça, tu iras en pension ! » Si, par le passé, l’internat a souvent été associé à une sanction, c’est aujourd’hui une solution choisie par quelque 244 000 élèves en France. Les raisons de ce regain d’intérêt sont nombreuses, les plus récurrentes sont pratiques et géographiques et liées à la spécificité d’une formation. Les familles y trouvent aussi une qualité d’enseignement, une ambiance propice au travail et des valeurs communes partagées en collectivité. « Les familles optent pour notre internat en raison de leur éloignement, ou d’emploi du temps professionnel avec des horaires décalés, qui les rendent moins disponibles pour leurs enfants. D’autres viennent pour la section sportive handball… Sans oublier ceux qui ont un besoin d’encadrement et recherchent la prise en charge par des professeurs, du soutien le soir et des heures d’études obligatoires », résume Patrick Lauféron, principal du collège La Châtaigneraie à Autun (lire son interview plus loin).

 

Un cadre propice au travail

En effet, a fortiori à l’heure de la prédominance des écrans, la tentation est grande de s’écarter des manuels scolaires pour des enfants dont les parents sont peu disponibles, où dont l’activité professionnelle est difficile à concilier avec la vie de famille . « Infirmière, je ne pouvais pas toujours suivre les devoirs de mon fils. Il a commencé peu à peu à décrocher scolairement. Ce n’était pas de gaité de cœur, mais après en avoir discuté ensemble, nous avons opté pour l’internat. Il s’est fait rapidement des copains avec qui il travaille en études, et ses résultats sont remontés rapidement ! Lorsqu’il a un coup de mou, je m’organise pour aller le chercher le mercredi », témoigne Vanina, qui élève seule son fils.

Car l’internat offre aussi un relais pour des parents « solo », qui peinent à encadrer leur enfant, notamment au moment de l’adolescence. A cet âge, où les jeunes aiment transgresser les limites, certains parents se sentent dépassés et apprécient l’intervention de personnels formés pédagogiquement et psychologiquement à ce type de problématiques. « Ils peuvent reprendre pied dans un milieu structuré », souligne Claude Carré, inspecteur général à l’Education nationale.

Mais attention à ne pas utiliser l’internat comme une punition, au risque que la réaction soit contraire à l’effet souhaité. « Mon fils avait de mauvaises fréquentations, fumait du cannabis… Avec sa mère, nous avions tout essayé. Nous lui avons présenté l’internat comme une chance pour lui de prendre un nouveau départ. Si, au début, il l’a très mal pris, après quelques semaines il s’est fait de nouvelles connaissances et a notamment retrouvé le goût du sport, avec l’équipe de basket de son lycée. L’équipe pédagogique a été d’une grande aide dans ces moments difficiles », relate, soulagé, Christophe.

 

HD-406---internat-3Un quotidien rythmé et encadré

L’image d’Epinal des lits alignés par 12 en épis et de l’eau froide dans les douches collectives sans rideau est bien loin. De nos jours, avec le soutien du gouvernement qui a entrepris de nombreux chantiers pour moderniser les internats, les élèves partagent des chambres de 2 à 6 personnes et des espaces plus chaleureux et familiers. « Mon premier internat était vieillot, on était 8 par chambre. On s’entendait très bien mais ce collectif était parfois un peu lourd avec la salle de bain à partager. Aujourd’hui, je suis dans un internat moderne et confortable, et je recours au co-voiturage pour rentrer le mercredi. Ça m’a rendu vite indépendante ! », raconte Bérengère (lire en encadré page ci-contre).

Si les centaines d’internats existants peuvent diverger en termes d’encadrement, plus ou moins strict, de prix ou d’exigence, ils concourent au même objectif : contribuer à l’équilibre de l’élève en lui offrant un lieu de vie avec des conditions favorables, un rythme précis et une régularité d’horaires et d’activités.

A la Châtaigneraie, un temps d’études encadré est obligatoire chaque soir et, après le dîner, les élèves ont un temps libre où ils peuvent jouer au ping-pong, au foot, appeler leur famille, avant de rejoindre leur chambre, se doucher… et respecter l’extinction des feux à 21h15. « Le soutien apporté lors de l’étude se fait en lien direct avec les professeurs pour s’adapter à leurs besoins. Et nos outils numériques facilitent leur suivi individualisé », précise son principal, qui n’a vu aucun cas de transgression. Et pour cause, finies les batailles de pelochons, une alarme détecte les mouvements durant la nuit ! Les seules soirées où l’heure du coucher est retardée ont lieu lors des sorties collectives au cinéma, au théâtre…  « La mixité n’est vraiment pas un problème car nos mineurs ne peuvent jamais être sans adulte encadrant. Le moindre écart est immédiatement recadré », assure le principal du collège de la Châtaigneraie.

 

HD-406---internat-SIPAUne seconde famille

« Dans mon ancien internat, étant peu d’élèves nous étions très proches des pions qui étaient super avec nous, et nos soirées à la patinoire, au cinéma sont d’excellents souvenirs » témoigne Bérengère. Si, pour des générations précédentes, la vie en collectivité a parfois ressemblé à un huis clos étouffant, elle peut se révéler une seconde famille, sans jamais prétendre remplacer la première. « Vivant ensemble, une solidarité se crée entre les internes, ainsi que des liens entre tous les membres de l’internat. Il y a un équilibre à trouver, entre les moments où l’on est plus cadrant et ceux où l’on est plus à l’écoute, car bien sûr, les élèves se confient et nous sommes là pour les moments délicats aussi ! » reconnaît Patrick Lauféron, qui souligne également l’opportunité d’ouverture culturelle. Car l’internat est bien plus qu’une solution d’hébergement et propose de nombreuses activités périscolaires qui varient selon les ressources locales.

 

A l’heure du choix

Si la décision de mettre son enfant en internat peut donc se révéler une excellente solution, reste à bien choisir l’établissement. L’annuaire en ligne de l’Education nationale recense près de 1 700 internats publics, dont le coût à l’année varie de 1 500 à 2 000 euros. Des aides sont accessibles (lire en encadré). S’il est conseillé d’anticiper pour réserver une place, plusieurs critères seront à prendre en compte à l’heure du choix : l’organisation des études et l’encadrement, la situation géographique, le coût, le projet pédagogique, la réussite aux examens, les activités, etc.

Dans tous les cas, il est primordial d’associer votre enfant à votre recherche.  N’oublions pas que plus l’enfant aura l’impression de subir l’internat, moins il s’y sentira bien. « Je voulais faire cette école du cheval, donc j’étais volontaire », témoigne Bérengère, qui se souvient de son arrivée à l’âge de 14 ans à l’internat du lycée du cheval de Saint-Cyran-du Jambot. « S’il est normal d’avoir peur au début, mes années d’internat resteront les meilleures ! », encourage-t-elle.

EP

 

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ZOOM

L’internat en chiffres-clés

  • Sur 5,7 millions d’élèves dans le secondaire, 244 000 sont internes, dont 180 415 dans le public.
  • Une majorité d’internes est composée de garçons : 137 000 garçons pour 107 000 filles.
  • Les places disponibles dans les internats publics s’élèvent à 229 562 et se répartissent ainsi entre niveaux scolaires : collège : 11 973 places, lycée professionnel : 56 118 places, lycée général et technologique : 161 471 places.
  • Une aide financière d’un montant forfaitaire annuel de 258 euros est attribuée à tous les élèves internes boursiers.
  • Retrouvez l’annuaire des internats de l’éducation nationale sur www.internat.education.gouv.fr.

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Béatrice, maman de Mathilde et Bérengère (en photo avec sa maman), âgées respectivement de 28 et 18 ans, qui ont suivi leurs études en internat, pour des raisons de choix d’études, loin de leur foyer de Naintré (86)

« Mon aînée Mathilde, aujourd’hui salariée au service qualité textile chez Aigle, a dû partir la première préparer un BEP couture à Loudun, puis un bac artisanat et métiers d’art à Angoulême, avant de poursuivre en BTS à Limoges. Dans son premier internat, qui n’avait pas été rénové, elle a souffert d’un manque d’intimité avec une salle de bain sans porte pour 6 ; elle rentrait le mercredi pour faire une coupure. A Angoulême, elles n’étaient que 3 par chambre et l’internat rénové était confortable, cela a été plus facile !

Ma seconde fille Bérengère a quitté la maison encore plus tôt, dès ses 14 ans, pour intégrer le lycée du cheval de Saint-Cyran-du Jambot. Au sein d’anciens bâtiments du château, l’internat austère était composé de chambres de 8 lits superposés. Stressée dans la voiture, une heure après notre arrivée, elle s’était déjà fait des copines et elle était dans le monde du cheval, elle était bien ! Elle poursuit actuellement ses études en bac professionnel à Bressuire, dans un internat moderne et elle s’organise parfois pour rentrer en co-voiturage le mercredi. Lorsqu’elle revient le week-end, elle lance ses machines et a toujours fait seule son sac !

Si on les perd d’un côté, nos enfants deviennent vite très autonomes ! Et cela a joué positivement sur leur scolarité : s’il y a quelque chose qu’elles ne comprennent pas, l’effet de groupe est bénéfique. Lorsque nos enfants veulent partir, il faut les laisser, on ne les a pas faits pour soi, après ce qui importe à mes yeux est qu’ils soient heureux dans leur vie ! »

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itw-406---principal-internaPOINT DE VUE

Patrick Lauféron, principal du collège La Châtaigneraie à Autun, qui dispose d’un internat mixte de 60 places, entièrement rénové

« Un cadre propice à la réussite et à l’ouverture culturelle »

 

« L’internat apporte aux familles un cadre propice à la réussite de la scolarité, ainsi qu’une ouverture culturelle via les activités. Les mercredis après-midi, après un temps de travail obligatoire, sont proposés des jeux, ateliers artistiques et sportifs avec des associations. La plupart se déroulent au sein du collège, mais certains pratiquent aussi la voile, le vélo, la natation… Les jeudis soir, des sorties sont parfois prévues au théâtre, au cinéma…

Chaque veille de vacances est organisé un temps fort collectif, qui peut être une sortie zoo, patinoire, laser game. Le premier de l’année est une randonnée avec tout le personnel afin que tout le monde apprenne à se connaître, ainsi qu’une après-midi dédiée à la méthodologie pour les aider à faire face à leur nouvelle autonomie. Car si l’internat se déroule souvent très bien, le plus délicat reste le début ! Aussi préparons-nous dès le mois de juin leur intégration : nous accueillons chaque famille afin de mieux répondre à leurs besoins spécifiques, au niveau de la scolarité, la santé, les activités.

Un temps est aussi dédié à la découverte de l’établissement à la rentrée avec les familles et tout le personnel : assistant d’éducation, infirmière scolaire, CPE… S’ils repèrent le moindre mal-être chez un élève, ils vont directement lui parler et des moments réguliers d’échange sont possibles avec leurs parents. Rapidement, les plus jeunes se font des camarades, ils ont le soutien de l’équipe pédagogique sans oublier les activités qui font qu’ils n’ont plus le temps de s’ennuyer. L’ouverture culturelle est un vrai plus pour les parents qui n’auraient pas forcément la possibilité d’organiser ces sorties, et l’internat leur apprend surtout à vivre ensemble, partager et se respecter ! »

 

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