EDUCATION

Le stage de 3e, premiers pas dans l’entreprise

HD-398---stage-1Chaque année, les élèves de 3e quittent les bancs du collège pour effectuer un stage en entreprise. Durant cinq jours, ils observent les professionnels qui les entourent dans le but de découvrir un métier ou, tout simplement, le monde du travail. Pour certains, ce stage est synonyme de révélation, pour d’autres de contrainte.

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Collégienne en classe de 3e, Emma a un rêve : elle sera ostéopathe. Au cours de l’année, son professeur principal annonce à l’ensemble de la classe la mise en place prochaine des stages en entreprise. Emma et ses camarades vont rejoindre l’univers professionnel pendant cinq jours. Pour la jeune fille, son objectif est clair : elle effectuera son stage dans un cabinet d’ostéopathe ou de kinésithérapeute. Finalement, c’est ce deuxième choix qui s’offrira à elle. Le stage se déroule, sans heurt, mis à part un : ce métier n’est pas du tout fait pour elle ! « Emma s’est rendue compte qu’elle allait devoir toucher des corps à longueur de journée, que ce n’était pas forcément agréable et que ça n’allait pas du tout avec son caractère, raconte la mère d’Emma, Carole Pietra-Saunier. Mais au final, elle ne vit pas du tout ce stage comme un échec, au contraire, car il lui a évité une mauvaise orientation. Aujourd’hui, elle se dirige vers des études de droit. »

Le stage de 3e est important car il permet à un élève de découvrir un métier, comment il fonctionne, quelles en sont les tâches quotidiennes. Pour un collégien qui a déjà une idée précise de sa future orientation, il peut le conforter dans son choix ou bien, comme Emma, l’inciter à choisir une autre voie. Cependant, en 3e, tous les enfants n’ont pas encore d’idée précise de leur futur métier : le stage se révèlera alors être un excellent moyen pour établir un premier contact avec la vie d’entreprise. Non seulement l’élève découvre le fonctionnement et les codes du travail, mais il se confronte aussi à son ensemble de règles : respecter la hiérarchie et les horaires, prévenir en cas de retard, s’habiller correctement, échanger avec des collègues, etc.

« L’objectif est de leur montrer un autre environnement que celui qu’ils connaissent à l’école. La vie de l’entreprise va devenir concrète », résume Dominique Cognard, chargé de mission Relation Ecole-Entreprise à l’académie de Clermont-Ferrand. « Même si c’est sur une courte durée, ça leur fait mettre un pied dans l’entreprise, ajoute pour sa part Carole Pietra-Saunier. Cela les fait se lever le matin pour vivre autre chose que leurs cours. Les journées peuvent sembler longues, mais c’est à l’entreprise de jouer le jeu aussi… »

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HD-398---stage-3Un travail très restreint

En effet, pas question de considérer l’élève comme un salarié à part entière. Lors du stage, aussi appelé « séquence d’observation en milieu professionnel », l’élève doit faire preuve de sérieux. Cependant, il n’occupera pas de poste proprement dit. La loi l’interdit. « L’élève n’a pas le droit de travailler, il ne peut qu’observer. Il peut participer à des tâches qui ne présentent aucun risque, à partir du moment où il est encadré et qu’il ne reste pas seul », souligne Dominique Cognard. C’est pourquoi, l’élève est suivi par un tuteur de stage, un salarié de l’entreprise. A lui d’accueillir comme il se doit son stagiaire, de lui présenter la société et ses différents métiers. Sous sa surveillance, le collégien pourra effectuer de petites tâches correspondant aux travaux légers autorisés aux mineurs par le Code du travail : plier des serviettes dans un salon de coiffure, donner le goûter aux enfants en centre aéré, enlever les fleurs mortes chez un fleuriste, faire du classement dans un cabinet de comptable…

Pour Eric, qui a effectué son stage auprès du pharmacien de son quartier, son rôle consistait à réceptionner les commandes : « je sortais les médicaments du carton, puis les scannais avant de les ranger. J’ai aussi fait du rayonnage, j’ai trié les médicaments périmés et j’ai assisté à un rendez-vous avec un représentant ». Eric est en quelque sorte un élève « chanceux », qui a pu se voir confier des tâches variées. Mais le champ d’action des entreprises est vite limité, car la législation du travail est très stricte concernant les mineurs. Par exemple, il est interdit aux jeunes stagiaires de travailler sur des appareils, machines ou produits dangereux (outils tranchants, poulies, gros engins, produits nocifs, etc.). De même, l’entreprise doit respecter des horaires précis : l’élève ne peut pas travailler plus de 8 heures par jour, pour un total hebdomadaire de 30 heures pour les moins de 15 ans, ou 35 heures pour les plus de 15 ans. Le stagiaire conserve également le droit aux vacances scolaires : le stage ne peut avoir lieu que sur le temps de l’école. Cet ensemble de règles est rappelé dans la convention de stage, un document indispensable pour s’assurer que le stage soit bien encadré. La convention de stage est obligatoire. Elle est signée entre l’entreprise, le chef d’établissement, l’élève et ses parents.

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La recherche du stage

Dans tous les cas, le plus important, c’est que le stage soit instructif et constructif. Et pour y parvenir, il faut savoir anticiper la recherche de l’entreprise d’accueil. Dès le début de l’année scolaire, l’élève peut commencer à cibler les entreprises, ou du moins les secteurs d’activité qui l’intéressent. Bien sûr, il peut solliciter l’aide de sa famille pour trouver son stage, mais effectuer les recherches par lui-même témoignera de sa détermination et de sa motivation. En cas de difficultés, la famille peut aussi se tourner vers les équipes pédagogiques du collège, certaines académies ayant préparé un listing des entreprises prêtes à accueillir des stagiaires.

Durant cette recherche, l’élève devra également se plier au rituel du CV et de la lettre de motivation. « Le CV et la lettre de motivation correspondent à une étape de préparation du stage. Les tuteurs n’attendent pas de l’élève de mettre en avant la moindre expérience professionnelle, mais plutôt des éléments qui justifieront sa motivation », indique Dominique Cognard. C’est le cas d’Alice, passionnée de chiens. Pour son stage de 3e, elle souhaitait rejoindre une société en rapport avec ses animaux favoris. Elle a donc démarché un salon de toilettage canin qui a accepté de la prendre sous son aile. « Mon stage s’est très bien passé. J’ai brossé les chiens, aidé à leur lavage, j’ai observé et j’ai posé des questions à la gérante, très ouverte pour partager son métier », se souvient Alice. Aujourd’hui lycéenne en terminale S, elle se dirige vers des études de vétérinaire.

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HD-398---stage-2Le rapport de stage, un support pédagogique

Enfin, à l’issue du stage, le collégien devra remettre un rapport de stage, qu’il présentera à l’oral devant un jury et son tuteur. Cela lui permet de synthétiser les enseignements de son séjour en entreprise. La soutenance est notée et compte dans la note finale du Brevet des collèges. « On incite à ce que le stage soit exploité, pour mettre en évidence des compétences d’écriture dans la construction d’un rapport, et des compétences orales lors de la présentation de ce rapport devant un jury, ajoute Dominique Cognard. Cet exercice permet à l’élève de mieux mettre en évidence ce qu’il a retenu du stage. L’équipe pédagogique pourra, quant à elle, mieux l’accompagner dans le choix de son orientation. »

Le stage de 3e peut être l’occasion d’un coup de cœur pour un métier : il faut alors s’assurer que l’élève ait toutes les cartes en main pour suivre sa préférence dans les meilleures conditions, sans le décourager.

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POINT DE VUE

Brigitte Hautrive, principale du collège Ferdinand Bac, à Compiègne (60)

« Aujourd’hui, les élèves ne sont plus en contact avec les différents métiers, dont ils ont des idées reçues. Ils ne connaissent que les écrans. Aussi, le stage de 3e leur permet de prendre contact avec des professionnels auxquels ils n’auraient jamais pensé. Ils découvrent aussi le fonctionnement d’une entreprise : ils voient que des règles existent, ailleurs qu’à l’école. Généralement, les élèves ressortent transformés de cette semaine en entreprise. Ils gagnent en maturité : ce ne sont plus des enfants, mais des stagiaires.

De plus, le stage sert de support pour renforcer l’action pédagogique : la lettre de motivation permet de soigner son français, le rapport de stage de travailler son aisance à l’oral. »

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ZOOM

Comment trouver son stage ?

Trouver un stage de 3e relève parfois du parcours du combattant. En effet, dans la majorité des cas, l’élève est souvent contraint de solliciter les proches de sa famille. Mais comment faire quand il est privé de « réseau » ? Une solution consiste à se tourner vers les institutions, qui déploient certains dispositifs pour les jeunes stagiaires. C’est le cas par exemple avec les banques de stages des conseils départementaux. Ces plateformes en ligne listent les entreprises, structures et services publics ou associations, qui se proposent d’accueillir des élèves de 3e. La plupart des sites s’adressent aux collégiens, mais aussi à leurs parents, aux professeurs et aux entreprises. Il est possible d’y déposer ou d’y consulter des offres de stage, sans oublier de nombreux conseils pour que le stage se déroule au mieux. Pour savoir si votre département a mis en place une telle plateforme, il suffit de le contacter ou de vérifier sur son site internet.

Des associations permettent également d’accompagner l’élève dans ses recherches : par exemple, www.viensvoirmontaf.fr, qui met en relation jeunes et professionnels. A noter enfin que les associations locales PEEP proposent aussi parfois des offres de stage via le réseau des parents.

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TEMOIGNAGE

Maud Dufossé, Amiens

Maud Dufossé est mère de trois enfants. Tous ont effectué un stage de 3e en entreprise. Aucun ne l’a vécu de la même façon. « Mon fils aîné a rejoint un garage en mécanique auto. Il a postulé auprès d’une de nos connaissances, c’était la solution de facilité. Ma fille Anaïs voulait, elle, travailler dans la menuiserie. Elle a donc trouvé un stage dans ce secteur, ce qui a conforté son choix professionnel. Enfin, ma fille Camille voulait devenir coiffeuse. Elle a fait son stage en salon de coiffure et a très vite su que cette voie n’était pas pour elle », décrit Maud Dufossé.

« Pendant cinq jours, je n’ai fait qu’observer. Je ne pouvais rien faire d’autre que regarder et essayer de comprendre les termes techniques que l’équipe utilisait à longueur de journée. Peut-être que si j’avais pu pratiquer un peu, j’aurais découvert une autre facette de ce métier et je l’aurais davantage apprécié », partage Camille, qui a définitivement fait une croix sur le métier de coiffeur.

Selon sa mère, le stage de 3e est une démarche qui pourrait être améliorée : « en 3e, les élèves sont trop jeunes pour avoir une idée précise de leur métier. Pour gagner en efficacité, les stages devraient être mieux encadrés ou plus fréquents. Avec deux stages autour de deux métiers différents, les élèves en apprendraient davantage. »

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