EDUCATION

EDUCATION – Entrée au collège : les clés d’un bon accompagnement

La rentrée en 6e se prépare dès le CM2. Un travail qui relie enfant, parents et corps enseignant. Le point sur cette étape cruciale pour réussir le passage dans le secondaire.

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« Je n’avais fait le trajet en bus qu’une ou deux fois dans l’été… Je pensais que cela avait été suffisant ! Seulement, le jour de la rentrée, j’ai paniqué et pris le bus dans la direction opposée. Résultat des courses : 40 minutes de retard ! »
Cette mésaventure, Oscar la raconte aujourd’hui avec le sourire, mais à l’époque, cela lui a valu les railleries de ses nouveaux camarades et surtout un premier trimestre d’angoisse. A chacun de ses réveils, la peur d’arriver en retard le paralysait. Un dérapage logistique non sans répercussion sur ses premiers résultats et sa motivation. En effet, l’entrée au collège n’est pas seulement marquée par un changement d’établissement, c’est un contexte nouveau à tout point de vue pour le jeune élève. « Il ne faut pas sous-estimer le cap que représente l’entrée au collège, explique Laure Dumont, auteur spécialisée sur les questions d’éducation (1). Vos enfants doivent gérer beaucoup de choses en même temps à ce moment-là : des bouleversements de la puberté aux changements de rythme et de manière de travailler. »
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Anticiper les changements
Pour que ces changements ne se transforment pas en traumatismes, il est important que l’enfant prenne ses marques, et le plus tôt est le mieux. Dans le courant de l’année qui précède l’entrée en 6e, rendez-vous sur place – plusieurs fois s’il le faut – et rencontrez quelques enseignants ainsi que les conseillers d’éducation. « J’enseigne depuis longtemps en milieu rural, témoigne Claude professeur de CM1-CM2 en Indre-et-Loire, et, d’après mon expérience, ce qui impressionne beaucoup les élèves est de passer d’un établissement où ils sont une petite centaine avec un référent unique à un collège quatre à cinq fois plus important sous l’autorité d’une dizaine de personnes. » Grâce à une visite préalable, l’enfant ne se sentira pas pris dans un tourbillon.
L’autre principal bouleversement que va subir l’enfant réside dans le changement de rythme : l’établissement est souvent plus loin que l’école élémentaire, les journées sont plus longues (en général, à partir de 8h jusqu’à 17h-18h), les matières sont plus nombreuses ainsi que les devoirs et évaluations. « Pour les classes de 6e, nous veillons à augmenter le rythme progressivement, confie Isabelle qui enseigne les mathématiques dans un collège parisien. Néanmoins, je conseille aux parents d’élèves de CM2 que je rencontre d’adopter le plus tôt possible un rythme régulier aussi bien dans le travail que dans le coucher. » Une hygiène de vie qui va permettre au futur collégien d’être physiquement et intellectuellement plus disponible afin de tenir le rythme plus soutenu qui l’attend.
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L’acquisition de l’autonomie
Fort de ces repères, le collégien doit alors acquérir l’autonomie nécessaire à un travail efficace dans le secondaire. Cet apprentissage peut également démarrer progressivement dès la fin de l’école élémentaire : « Mon instituteur de CM2 nous avait préparés à ce cap, raconte Oscar. Il nous avait conseillé d’être maîtres de notre cahier de texte et de notre cartable. Il ne fallait pas attendre que lui ou nos parents le fassent à notre place, nous devions être responsables. » Bien entendu, reste aux adultes de contrôler ces éléments, car à l’âge de l’entrée en 6e, les enfants sont encore « petits » quoi qu’ils en disent ! Néanmoins, ils commencent à ressentir ce besoin d’émancipation et comme l’explique Laure Martin, psychologue scolaire : « Cela peut se traduire par des actes très symboliques : faire le chemin de l’école seul, avoir sa propre clé de la maison, s’occuper de l’achat du pain ou du journal…  ».
Ces petites responsabilités doivent nourrir l’assurance de l’enfant. Quelques exercices de réflexion peuvent l’aider à faire le point sur cette notion de confiance en soi. L’ouvrage de l’enseignante belge Yvette Warnier, « Methodo, le coach des élèves : réussir le secondaire » (éd. De Boeck), offre des outils d’analyse pertinents tels que le chapitre consacré à l’influence de nos pensées – positives comme négatives – sur notre état d’esprit et notre motivation. Un petit questionnaire et une série de conseils permettent alors au jeune de faire le point sur certaines situations avant de juger. En somme, le collégien doit apprendre à s’accepter et à tirer le meilleur de chaque expérience.
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Adopter l’anticipation
A l’aise avec lui-même, l’élève pourra alors aborder plus sereinement le volet strictement scolaire du collège, lequel se caractérise par un emploi du temps plus dense – et parfois en gruyère –, de nouvelles matières et surtout, de nouvelles méthodes de travail. L’une d’elles consiste à revoir ses cours régulièrement et de façon automatique en vue des contrôles. L’autre se nomme anticipation. « Pour y préparer mes CM2, je leur donne certaines leçons non pas pour le lendemain, mais pour la fin de semaine ou la semaine suivante. A eux de gérer leur temps et idéalement, de s’avancer », explique Claude. Cette démarche, l’une des clés de la réussite en secondaire, reste néanmoins bien souvent difficile à inculquer aux enfants. Les devoirs à réaliser pour le lendemain sont déjà bien assez chronophages, pourquoi ajouter ceux prévus pour la semaine suivante ?!
Mais, comme le souligne Laure Dumont : « Il faut insister et leur montrer à chaque fois le bénéfice de cette anticipation : une poésie, dont on aura étudié une ou deux strophes par soir pendant plusieurs jours, s’apprend plus facilement qu’en une seule fois. » Accompagnez-le alors dans cette nouvelle habitude et sélectionnez avec lui – et selon son état d’esprit ! – les leçons sur lesquelles il peut s’avancer. Une petite perte de motivation ? Optez pour un seul exercice sur lequel il ne buttera pas. La grande forme ? Reprenez les cours plus ardus. Petit à petit, notez les progrès : devient-il moins réticent à cette méthode ? L’applique-t-il de lui même (en permanence ou à l’étude) ou faut-il le guider encore dans cette démarche ?
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Un changement sous surveillance
Dans tous les cas, ne forcez pas. Du temps et des encouragements sont souvent tout ce dont ils ont besoin. La mise en place de ces nouveaux principes demande, en effet, de la répétition. Il est important d’amorcer ce virage avant la rentrée, puis d’y revenir régulièrement avec l’enfant. Lorsque le passage est plus douloureux, il est nécessaire de s’entretenir avec le professeur principal ou bien avec le professeur d’une matière source de difficultés. Ensemble, cherchez à cerner la cause de cette situation : méthodes, environnement, rythme… L’enfant répondra sans doute en levant les yeux au ciel, mais il est essentiel qu’il vous sente concerné par sa situation. Isabelle, l’enseignante de Paris rappelle que la classe de 6e constitue à elle seule un cycle entier : « C’est le cycle d’adaptation et, comme son nom l’indique, il assure la transition du primaire au collège. S’il existe des difficultés, il est encore temps d’y remédier. »

Note

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REPERES

Conseils pratiques

• La vie au collège : choisir un sac léger et solide, connaître l’emploi du temps, rencontrer enseignants et CPE.

• La vie à la maison : surveiller le temps de sommeil, respecter le petit-déjeuner, veiller sur le travail scolaire, contrôler les écrans (messageries, internet, jeux vidéo et télévision).

• La vie à l’extérieur : connaître ses camarades, parler des dangers (racket, alcool, drogues).

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TEMOIGNAGE

Emily Huang, mère de Pierre, élève de 5e

« Pierre était très bon élève au primaire. Mais il est très introverti et ne nous a jamais confié que le passage au collège l’impressionnait. Nous avons découvert ses difficultés en recevant le bulletin de 1er trimestre avec de mauvaises notes et des appréciations moyennes. Avec le professeur principal, nous avons convenu que Pierre devait dorénavant nous faire signer ses interrogations afin que nous contrôlions son travail. Mais il s’est senti puni et est devenu encore plus introverti. Nous avons alors compris que son échec était dû non pas à son niveau scolaire mais à son manque de confiance en lui. J’en ai parlé avec ses enseignants lors de la réunion parents-professeurs, ainsi qu’avec notre pédiatre. Depuis, la situation s’est débloquée. »

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INTERVIEW
Alain Corneloup, auteur de « 100 idées pour réussir son entrée au collège » (éd. Tom Pousse)

Comment percevez-vous la transition école-collège ?

C’est le passage le plus difficile. L’enfant devient un adolescent. Il faut bien entendu discuter de ces changements avec lui, mais il ne faut pas forcer le dialogue. C’est pourquoi il est indispensable d’être en liaison avec le collège. Même s’il n’y a pas de problème, il faut être en contact avec le professeur principal et le conseiller d’éducation.


Concernant le travail à la maison, quel conseil donnez-vous ?

Les parents doivent trouver en moyenne vingt minutes par jour à consacrer au travail de l’enfant : faire réciter les leçons, contrôler le travail de la journée, signer le carnet ou autre et vérifier le cartable. Cela devrait idéalement se produire à heure fixe, de façon à institutionnaliser le rituel, comme le brossage des dents.


Quelle position avez-vous sur le téléphone portable dès le collège ?

La gestion d’internet et du mobile est compliquée. Cela a son avantage, mais cela « désautonomise » l’enfant également d’une certaine façon. En voulant être rassurés, les parents retirent une part de confiance dont l’enfant à besoin.

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