EDUCATION

EDUCATION – Classes de découverte : quand les élèves se mettent au vert

L’intérêt pédagogique des classes de découverte pour les enfants n’est plus à démontrer. Elles restent pourtant soumises au bon-vouloir des enseignants.

-

C haque année, des dizaines de milliers d’élèves de primaire quittent leur classe et leur famille, direction un centre de vacances à plusieurs centaines de kilomètres de chez eux, le plus souvent à la mer ou à la montagne. Pendant plusieurs jours, ils vivent, mangent, rient et dorment avec leurs camarades de classe sous le contrôle de leur maître ou de leur maîtresse. Ainsi, en octobre dernier, les élèves de  CM1 de Pacy-sur-Eure (27) sont partis dix jours à la montagne visiter des villages, découvrir le fonctionnement des cadrans solaires et apprendre à fabriquer du fromage de chèvre. En 2010, ce sont ceux de l’école Matisse de Montigny (95) qui ont appris à construire des moulins et réalisé du « land art » (réalisations artistiques avec des matériaux de la nature) dans la forêt corrézienne.
Les premières « classes vertes » sont organisées en France dans les années 1950. Elles se multiplient rapidement avant d’être officiellement reconnues en 1971. Baptisés « classes transplantées » puis « classes d’environnement », les « séjours courts » (de 1 à 3 nuitées) et les « classes de découverte » (4 nuitées et plus), comme ils se nomment aujourd’hui, sont encouragés par  l’Education nationale qui y voit un bon moyen d’« enrichir les apprentissages » et de favoriser « l’acquisition de connaissances et de compétences » (Circulaire sur les sorties scolaires du 5 janvier 2005).
-
Un dossier à faire valider par l’Inspection
Pour autant, les classes de découverte restent facultatives et leur organisation dépend entièrement de la motivation des enseignants. Et de la motivation, il en faut ! En effet, il leur revient de présenter le projet au conseil d’école, dénicher un lieu d’accueil, concocter un programme détaillé, convaincre des parents d’accompagner le groupe, etc. Il faut aussi trouver des moyens pour financer le projet. En effet, pour répondre à la circulaire de 2005 qui demande à ce que les parents aient un minimum  à payer, l’enseignant doit tenter de décrocher des subventions, notamment auprès de la mairie et du Conseil général. Des entreprises privées peuvent aussi être sollicitées, à condition qu’aucune publicité ne soit exigée en contrepartie. Au final, aucun parent ne doit renoncer à laisser partir son enfant pour des raisons financières.
Chaque classe de découverte est soumise à l’autorisation de l’inspecteur d’académie. Un dossier complet, comprenant notamment une demande d’autorisation de départ en sortie scolaire et une fiche d’information sur le transport, doit être transmis à ses services au moins 8 semaines avant le départ (5 semaines lorsque le séjour se déroule dans le même département et 10 semaines quand il a lieu à l’étranger). Le dossier doit être accompagné d’un projet pédagogique et éducatif ainsi que d’un programme détaillé du séjour. L’accord est donné après vérification notamment que le lieu de séjour est apte à accueillir une classe, que les modes de transport empruntés sont adaptés, que le budget est raisonnable et l’encadrement suffisant.
Au moins deux adultes, dont l’enseignant, doivent accompagner le groupe, auxquels s’ajoute un adulte supplémentaire par tranche de 10 élèves (de 8 élèves en maternelle) lorsque le nombre d’enfants est supérieur à 20. La pratique de certaines activités nécessitant par ailleurs un encadrement spécifique supplémentaire.
-
Des effets pour l’année
Outre l’aspect administratif, les classes de découverte doivent aussi répondre à un intérêt pédagogique. Le Bulletin officiel n° 2 du 13 janvier 2005, qui définit le cadre réglementaire des séjours scolaires, apparaît très clair sur le sujet : les activités pratiquées lors des sorties scolaires doivent contribuer « à la mise en œuvre des programmes » et « s’intégrer au projet d’école ».
Les classes de découverte exigent par ailleurs « une préparation et des prolongements qui en garantissent l’efficacité ». L’enseignant peut ainsi, avant même le départ, demander aux élèves de réunir des informations sur le lieu du séjour (Quels paysages vont-ils découvrir ? Quel climat ?) ou sur les monuments qu’ils visiteront. Il peut aussi, lors de séances de sciences, leur demander d’émettre, sur la vie des arbres ou des insectes par exemple, des hypothèses qu’ils pourront par la suite vérifier en observant la nature. Sur place, les occasions ne manquent pas non plus de leur faire observer ce qui les entoure, décrire ce qu’ils voient, retranscrire ce qu’ils découvrent… Ils pourront aussi être amenés à prendre des notes, à tracer des graphiques, à rédiger des synthèses, bref, à mettre en pratique ce qu’ils font d’habitude à partir de manuels. Leur apprentissage prendra alors tout son sens.
Une fois de retour à l’école, tout n’est pas fini. Les informations qu’ils auront amassées pourront être exploitées sous la forme d’une exposition-photo, d’un site internet ou d’un spectacle qui sera présenté aux autres enfants et aux parents.
-
De nombreux atouts
Rares sont les enfants qui reviennent inchangés d’une classe de découverte. En quelques jours, ils acquièrent une bonne dose d’autonomie, apprennent la vie en collectivité, s’ouvrent sur le monde. La cohésion du groupe en sort souvent renforcée. Les parents aussi en tirent bénéfice. « Ils sont souvent plus inquiets que leurs enfants, constate Marie, une institutrice de CE2. En général, je leur demande de remplir une feuille sur laquelle ils inscrivent si leur enfant a du mal à dormir dans le noir ou fait parfois pipi au lit. Ça rassure tout le monde ».
Leur intérêt ne fait plus de doute, et pourtant les classes de découverte sont chaque année moins nombreuses. Les coûts élevés, les difficultés accrues de financement, la responsabilité renforcée des organisateurs ou encore les difficultés administratives expliquent en partie cette situation. Désignation d’ambassadeurs locaux, tarifs SNCF plus attractifs, simplification des démarches : l’Association des maires de France (AMF) a fait des propositions pour relancer les classes de découverte. Pour que les écoliers continuent à se mettre au vert !

__________

REPERES

Partir bien assuré

Comme pour n’importe quelle sortie incluant au moins une nuitée, la participation des enfants à une classe de découverte est laissée à l’appréciation de leurs parents. Contrairement aux sorties obligatoires organisées sur le temps scolaire, les parents doivent impérativement, outre une responsabilité civile, souscrire une assurance individuelle « accidents corporels ». Sans attestation en bonne et due forme, l’enfant ne pourra pas partir. Une telle assurance est aussi recommandée pour les accompagnateurs bénévoles.

Avec son partenaire MMA, la PEEP propose des assurances spécifiques pour vous garantir dans ces situations. N’hésitez pas à vous renseigner auprès de votre association de parents d’élèves.

__________

ZOOM

Des séjours pour lutter contre l’illettrisme à La Réunion

Sur l’île de La Réunion, un adulte sur cinq éprouve de grandes difficultés pour lire, écrire et compter. Pour faire baisser ce taux deux fois supérieur à celui de la métropole, des classes de découverte spécialement axées sur la lutte contre l’illettrisme sont organisées. Celles-ci accueillent, plusieurs fois par an, des groupes de 10 à 15 enfants ou adolescents, âgés de 6 à 18 ans. Volontairement, des jeunes sans problème particulier accompagnent des enfants en difficulté scolaire. Un tel mélange évite la stigmatisation de ces derniers et renforce leur motivation. Loin de chez eux, les enfants passent une partie de leurs vacances à jouer, faire du sport, s’amuser…

Contrairement à un séjour classique, des séances de travail sont prévues chaque jour. Menées par des enseignants, des membres d’associations ou des animateurs recrutés par les communes, ces séances se déroulent le plus souvent au sein d’écoles publiques, ouvertes pour l’occasion. Par petits groupes, les élèves (ré)apprennent à lire et à écrire. Le reste du temps, ils visitent des fermes, participent à des pique-niques, montent des pièces de théâtre. Autant d’occasions d’acquérir du vocabulaire.

Les enfants doivent être volontaires, voire demandeurs. Leurs parents doivent quant à eux donner leur autorisation. « Ils sont en général assez faciles à convaincre », reconnaît Darwin Dambreville, de l’antenne PEEP de La Réunion. Une participation financière leur est aussi demandée, mais des aides leur sont accordées en fonction du quotient familial. Dans tous les cas, « l’argent ne doit pas être un frein à l’apprentissage ».

__________

ECLAIRAGE

Les parents ne sont pas oubliés

Les parents font partie intégrante du projet. L’enseignant doit donc être disponible pour répondre à leurs questions et convaincre les plus réticents de laisser partir leur enfant. Il doit également informer les familles démunies du fait qu’elles peuvent bénéficier d’aides financières de leur caisse d’allocations familiales ou de leur comité d’entreprise.

Une fois l’enfant sur place, des moyens sont mis en oeuvre pour que parents et enfants puissent communiquer. Certaines familles ont à leur disposition un numéro de téléphone sur lequel elles peuvent écouter un message quotidien retraçant les activités des enfants. Mais de plus en plus souvent, les enseignants tiennent à jour un blog qu’ils enrichissent chaque jour de photos et de commentaires. Les parents sont aussi invités à envoyer des mails ou des cartes postales à leur enfant.

Mot-clé:

Pas de commentaires pour le moment.

Donnez votre avis