Rentrée : entre nouveautés et incertitudes
Entre mise en œuvre et mise entre parenthèses ! A cause de l’instabilité politique que connaît le pays depuis début juin, toutes les nouveautés prévues pour cette année scolaire 2024-2025 ne seront pas au rendez-vous. Sont ainsi reportées, entre autres, l’application des nouveaux programmes – déjà rédigés ! – de français et de maths en primaire, comme la réforme de la formation des enseignants, qui devait permettre le recrutement des futurs enseignants à la fin de leur dernière année de licence…
Quant à la réforme du brevet, prévue pour s’appliquer dès la session 2025, le flou est total ! L’évaluation du contrôle continu se fera-t-elle avec les notes de l’année ? Ou, comme c’est aujourd’hui le cas, avec le niveau d’acquisition du socle commun ? Autre interrogation d’importance : l’obtention du brevet sera-t-elle le sésame obligatoire pour entrer au lycée ? Tout est en suspens.
La rentrée 2024 verra toutefois de nouvelles mesures s’appliquer, principalement au collège, avec une réforme qui a suscité de nombreuses oppositions depuis son annonce : l’apprentissage du français et des mathématiques en groupes de besoins – appelés au départ groupe de niveaux – en classes de 6e et de 5e ; mais également dans l’enseignement professionnel avec une nouvelle terminale (deux parcours au choix).
Une rentrée scolaire placée sous le signe de l’incertitude… Le « Choc des savoirs », une batterie de mesures censée « élever le niveau de l’école », prévu par Gabriel Attal, l’ex-ministre de l’Education nationale devenu Premier ministre, ne sera que partiellement appliqué. Certaines mesures ont en effet été reportées, voire « gelées », à l’image du projet de décret qui devait rendre obligatoire l’obtention du brevet pour entrer au lycée, comme l’a annoncé la ministre de l’Education « démissionnaire » (selon l’expression consacrée), Nicole Belloubet, lors de sa conférence de rentrée le 27 août.
Des mesures contestées
Au final, deux grandes mesures seront tout de même au rendez-vous de la rentrée : les groupes de besoins au collège et les nouvelles évaluations en primaire. Si elles sont censées être opérationnelles à la rentrée, on peut s’interroger sur leur application… Ces deux nouveautés rencontrent en effet une vive opposition de la part des syndicats enseignants, qui ont (déjà) appelé à une grève le 10 septembre.
Evaluations de début d’année
Concernant les évaluations nationales, qui doivent se dérouler quelques jours après la rentrée, rappelons qu’elles sont un outil au service de l’enseignant afin qu’il puisse « disposer pour chaque élève de points de repères fiables afin d’organiser son action pédagogique en conséquence », tout au long de l’année scolaire. Ces repères, l’enseignant en prend connaissance avec les résultats des exercices de maths et de français auxquels les élèves sont soumis – à savoir : les parents d’élèves sont informés des résultats de leur enfant.
Cette année, ces évaluations nationales de début d’année concernent donc les 5 niveaux de l’école élémentaire (une première pour les élèves de CE2 et de CM2).
Signalons que la généralisation des évaluations mise en place à l’école élémentaire devait également se produire au collège à la rentrée, comme l’annonçait la circulaire de préparation de la rentrée, parue fin juin. Deux mois après, fin août, la ministre Nicole Belloubet indiquait au final que les nouvelles évaluations prévues en 5e et en 3e ne seraient qu’optionnelles, « proposées aux établissements volontaires »… Au final, les seuls collégiens qui passeront obligatoirement les évaluations nationales seront donc les 6e et 4e – comme à l’école élémentaire, un compte rendu des résultats des élèves sont transmis aux parents.
Quelle mise en œuvre des groupes de besoins au collège ?
Mise en place à la rentrée, une réforme suscite la polémique depuis son annonce. Cette réforme, c’est celle de l’enseignement du français et des maths en groupes de besoin, en 6e et en 5e, l’une des mesures les plus emblématiques du « choc des savoirs » de Gabriel Attal, dévoilé en fin d’année dernière. Face à la contestation, les textes officiels encadrant le fonctionnement de ces groupes de besoins (groupes constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs) prévoient, au final, une certaine souplesse dans leur gestion.
Ainsi, la composition des groupes – et donc la possibilité d’en changer – sera « réexaminée au cours de l’année scolaire, notamment à l’occasion des regroupements, afin de tenir compte de la progression et des besoins des élèves ». Ces « regroupements » justement – quand tous les élèves sont réunis dans leur classe de départ – pourront avoir lieu jusqu’à dix semaines dans l’année. Telle est la théorie ; en pratique, depuis la rentrée, notamment dans plusieurs collèges d’Ile-de-France, faute de moyens, on constate une mise en place très « partielle » de ces fameux groupes de besoins.
Le nouveau brevet en suspens
Egalement au collège, la nouvelle année scolaire devait voir la mise en œuvre d’un nouveau brevet, avec plus de poids pour les épreuves finales, une prise en compte du contrôle continu avec les notes de l’année plutôt que l’évaluation du socle commun, et, surtout, l’exigence de l’obtention du brevet pour entrer en seconde… Tout est aujourd’hui en suspens. Comme d’autres mesures reportées, il appartiendra à la nouvelle gouvernance de les mettre en place… ou non.
Nouvelle terminale professionnelle
Dans l’enseignement professionnel, en revanche, la réforme est bien en vigueur. Dès le mois de décembre, les élèves de terminale professionnelle devront choisir entre la poursuite d’études ou l’insertion professionnelle. Ce parcours différencié se concrétisera au troisième trimestre : les uns bénéficieront de cours intensifs pour préparer leur entrée dans le supérieur, les autres, qui se destinent à entrer rapidement sur le marché du travail, partiront en stage. Notons que cette réforme a une incidence sur le déroulement du bac pro, puisqu’une partie de l’examen sera organisée en mai.
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ZOOM
Interdication du portable au collège… vers une mesure réellement efficace ?
La mesure est inscrite dans la loi depuis 2018 ! Pourtant, dans les faits, l’interdiction des téléphones portables (et de tout autre terminal de communications électroniques comme les montre connectées) dans les écoles et les collèges demeure bien loin d’être respectée. La raison : la loi n’impose aucune obligation pratique aux écoles et aux établissements scolaires pour faire respecter cette interdiction.
Depuis cette rentrée, dans 200 collèges volontaires, une expérimentation est lancée pour que soit réellement appliquée cette interdiction. Comment ? Les collégiens sont tenus de déposer leur téléphone portable à l’entrée de l’établissement (dans des casiers), et ne peuvent le récupérer qu’en fin de journée, après les cours.
Cette « pause numérique », selon les termes de Nicole Belloubet, ministre de l’Education nationale, qui a initié cette expérimentation, pourrait être prochainement généralisée si elle est concluante. Restera la question des moyens. En charge des collèges, plusieurs conseils départementaux (Indre-et-Loire, Lot, Loiret…) ont déjà annoncé qu’ils refuseraient de financer l’installation de ces casiers…
Primaire : des mesures prévues… mais reportées !
La crise politique qui secoue le pays a eu un fort impact sur les réformes éducatives qui étaient prévues dans le cadre du « Choc des savoirs » de l’ex-ministre de l’Education nationale, Gabriel Attal, en décembre dernier, un ensemble de mesures concernant tous les niveaux de la scolarité.
Si plusieurs de celles-ci sont sur les rails, d’autres sont purement et simplement reportées ; les textes officiels (circulaires, décrets…) n’ayant pas été publiés ! C’est ainsi le cas des nouveaux programmes de français et de mathématiques pour le cycle 1 et 2 (les trois années de la maternelle, ainsi que les classes de CP, CE1 et CE2) qui ont été suspendus.
Même « sanction » pour les manuels scolaires de maths et de français en CP et CE1 : leur labellisation, qui devait consacrer ceux « dont l’efficacité des contenus a été prouvée par la science et par la pratique », reportée également ! Rappelons qu’aujourd’hui, on considère que près d’un tiers des classes à l’école primaire ne disposent pas de manuels de français ou de mathématiques… Mais rappelons également que, même dans le cas où cette labellisation devienne effective, elle n’obligera en rien les enseignants en vertu du respect de leur liberté pédagogique.
Une expérimentation a minima. Si elle suscite un fort écho médiatique, en ayant autant de virulents détracteurs que d’ardents défenseurs, la « tenue unique à l’école », comme il est convenu de l’appeler, sera bel et bien mise à l’essai pour cette nouvelle année scolaire. Basée sur le volontariat, cette expérimentation ne concerne au final que 90 établissements scolaires, dont une grande majorité d’écoles primaires. Rappelons que le coût de ces « uniformes » est pris en charge par l’Etat et les collectivités locales – aucune participation financière n’est demandée aux familles.
Cette expérimentation doit être évaluée d’ici deux ans, notamment en termes d’impact sur le harcèlement scolaire, avant une hypothétique généralisation.
Maintien des stages en seconde
En juin 2024, pour la première fois, les lycéens de seconde générale et technologique (GT) ont dû effectuer ce que l’on appelle une « séquence d’observation dans le monde professionnel » ; en d’autres mots, un stage en entreprise (qui peut aussi se dérouler dans des associations, des administrations, des établissements publics, des collectivités territoriales). Comme l’a annoncé la ministre de l’Education nationale lors de sa conférence de rentrée, ces stages en seconde sont reconduits en juin 2025.
Nouveau programme d’enseignement moral et civique
Les programmes révisés d’enseignement moral et civique (EMC) entrent progressivement en vigueur à compter de cette rentrée. Ces nouveaux programmes ont pour objectifs principaux la transmission des valeurs et principes de la République et la connaissance des institutions françaises et européennes. Ils vont d’abord concerner les élèves en début de chaque cycle, c’est-à-dire ceux en classes de CP, CE2, 5e et 2de. A chaque niveau son thème : « se reconnaître comme individu et élève » en CP ; « apprendre ensemble et vivre ensemble » en CE2 ; « Fraternité, égalité et solidarité » en classe de 5e, « Droits, libertés et responsabilité » en seconde… Notons que chaque grand texte fondamental (déclaration des droits de l’homme et du citoyen, constitution de la Ve République, loi de 1905…) est présenté de différentes manières au fil de la progression du cursus des élèves.
La rentrée dans l’enseignement supérieur
Que ce soit à l’université, dans les CPGE, classes préparatoires aux grandes écoles, ou encore en BTS, la nouvelle année ne présente pas de changements majeurs. A noter néanmoins la hausse des droits d’inscription universitaires – qui avaient été gelés pendant plusieurs années. Rappelons que les étudiants boursiers en sont dispensés, comme ils sont également exonérés du paiement de la CVEC (contribution de vie étudiante et de campus – d’un montant de 103 euros), et qu’ils bénéficient automatiquement des repas à 1 euro dans les restaurants du Crous (RU).
Retrouvez toutes les informations pratiques de la rentrée étudiante 2024 en consultant ICI le guide interactif édité par le ministère de l’Enseignement supérieur.