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Réseaux sociaux : à consommer avec modération !

HD-399---reso-2Les adolescents passent de plus en plus de temps sur les réseaux sociaux, et les parents sont parfois dépassés. Les risques liés à l’usage de ces applications existent, mais il est possible de les éviter avec un minimum d’attention.

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« Twitter », « liker », « follower », « stories »… Autant d’anglicismes qui sont devenus des termes de la vie courante, en particulier de celle des adolescents. Chez les jeunes, l’usage des réseaux sociaux explose. Selon une étude réalisée par Ipsos-Médiamétrie et publiée en 2015, 57 % des 11-12 ans seraient inscrits sur un réseau social en France. 77 % des 13-19 ans auraient un profil Facebook. Des chiffres en constante augmentation. En Grande-Bretagne, des chercheurs se sont penchés sur l’engouement des jeunes pour les réseaux sociaux pour établir une sorte de classement de leurs applications préférées. L’étude #Status OfMind dresse un panorama de la vie virtuelle, qui n’est pas toujours sans conséquences.

Ainsi, en tête de liste, se tient YouTube (site internet de vidéos), jugé comme source de découvertes, de détente et de partage. « YouTube est le réseau social le plus utilisé chez les adolescents, confirme Michael Stora, psychologue et fondateur de l’Observatoire des mondes numériques en sciences humaines (OMNSH). Il permet une forte créativité et est véhiculeur d’espoir : c’est un espace où on peut être reconnu pour sa musique, son talent en danse ou en chant. Malheureusement, il révèle aussi des inquiétudes car il est facile d’y retrouver des défis dangereux, comme le Fire Challenge, où les jeunes sont tentés de s’immoler par le feu. »

Autre application à double tranchant : Instagram (service de partage de photos et de vidéos). Derrière la volonté de poster des photos sous des filtres esthétiques, se cache une recherche permanente du beau. « Instagram, c’est le réseau social du visuel, qui promeut l’image idéalisée. C’est un espace assez tyrannique qui pousse les jeunes à la perfection », met en garde Michael Stora.

Les autres plateformes sont loin d’être irréprochables également : Facebook, réseau social numéro 1 au monde (plus d’un milliard d’utilisateurs !) est considéré comme le lieu le plus propice au cyberharcèlement, selon l’étude #StatusOfMind, et Snapchat, comme le réseau social le plus addictif duquel il est très difficile de se déconnecter. Le principe de Snapchat ? Poster un message ou une photo qui disparaît automatiquement au bout d’un temps limité, souvent de quelques secondes ! C’est en quelque sorte le réseau social de l’éphémère, qui conduit les adolescents à ne jamais décrocher, par « peur de manquer quelque chose ».

 

HD-399---reso-1Construction identitaire

Pourtant, malgré ce tableau très sombre, l’utilisation de ces réseaux sociaux peut receler certains aspects positifs. « Un adolescent est un être aux multiples facettes, avec un soi triste, un soi “vitrine” où il évoque ses centres d’intérêt, etc. Donc, de manière générale, les adolescents utilisent les réseaux sociaux comme un espace de la construction identitaire, où les “like” et les commentaires vont confirmer ou infirmer leurs publications. C’est une quête de sa personnalité », souligne Michael Stora. Les réseaux sociaux font partie d’un processus normal de l’adolescence. Auparavant, les adolescents passaient des heures au téléphone, après les cours, pour continuer d’échanger avec leurs copains. Aujourd’hui, ils pianotent sur leur smartphone et se retrouvent sur Facebook ou Snapchat. Interdire l’usage des réseaux sociaux, ce serait les priver de vivre avec leur temps. Si les réseaux sociaux sont néfastes, c’est avant tout à cause de comportements déviants. Et pour éviter les dérives, mieux vaut accompagner ses enfants dans l’usage de tels outils.

C’est ce que tient à faire Sophie, maman de Romane, 15 ans. Quand sa fille lui a demandé d’ouvrir un compte Facebook, Sophie a d’abord un peu tiqué. « Au début, j’avais peur qu’elle se retrouve sur un tel espace. Mais j’ai aussi pris conscience qu’il était facile pour elle de tricher et de créer ce compte dans mon dos. Je préfère être au courant et l’aider à bien utiliser ce réseau social. Je ne peux pas l’empêcher de mettre des photos d’elle sur Facebook, alors je lui ai exposé quels étaient les risques qu’elle encourait en se dévoilant trop. Je lui ai aussi montré les paramètres qu’elle devait régler pour mieux se protéger » indique Sophie.

En effet, en paramétrant avec l’adolescent son profil, seuls ses amis verront ses publications. Il garde le contrôle de ce qu’il partage. Une autre astuce : privilégier un pseudonyme plutôt que dévoiler son identité complète. Enfin, il faut lui rappeler de ne pas accepter de demandes de gens qu’il ne connaît pas et de savoir garder ses distances avec les « fake news » (fausses informations).

Pour mieux protéger les adolescents, le gouvernement s’invite également dans la partie. En décembre dernier, il a proposé un projet de loi sur la protection des données personnelles, dont l’une des mesures vise à interdire aux moins de 16 ans de s’inscrire sur un réseau social sans l’autorisation écrite des parents. Une mesure qui fâchera les adolescents et soulagera les parents ? Pour Michael Stora, quand parents et enfants ne parviennent pas à se mettre d’accord sur les réseaux sociaux, c’est avant tout à cause d’une « crise parentale ». « Il faut accepter que son enfant grandisse et ait des espaces à lui », assure le psychologue. L’usage des réseaux sociaux n’est pas à proscrire : il est avant tout une question de vigilance.

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ZOOM

Que faire en cas de harcèlement ?

Un adolescent victime de cyber-harcèlement est, le plus souvent, visé par d’autres jeunes qu’il connaît, persuadés d’être bien cachés derrière leurs écrans. Aux parents alors d’agir rapidement – en concertation avec leur enfant – en collectant toutes les preuves de cette agression : SMS, messages envoyés sur les réseaux sociaux, photos ou vidéos humiliantes… Ils peuvent ensuite présenter toutes les preuves récoltées au chef d’établissement, qui pourra engager des actions pouvant aller jusqu’à la mise à pied ou l’exclusion du ou des élèves incriminés.

Autre réflexe à avoir : changer les mots de passe (au cas où le compte aurait été piraté), suspendre le profil durant un certain temps, signaler les messages à la plateforme sur laquelle ils ont été postés. Les parents peuvent également contacter l’association e-enfance, en lien avec Facebook et la CNIL, pour demander à effacer les messages injurieux. Un numéro vert est disponible : le 0800 200 200.

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itw-399---reseau-t-delcourtINTERVIEW

Dr Thierry Delcourt, pédopsychiatre – psychanalyste à Reims

En quoi les réseaux sociaux sont-ils dangereux ?

Les réseaux sociaux sont des outils qui permettent aux adolescents de communiquer, de s’exprimer mais aussi de se valoriser. Pour cela, ils sont intéressants : ce sont des supports qui permettent d’être quelqu’un aux yeux des autres. Le problème, ce sont les usages déviants. Mal employés, les réseaux sociaux peuvent créer un embrasement et conduire, dans les cas les plus graves, à du harcèlement. C’est d’autant plus délicat pour les 11-14 ans, qui sont en pleine construction de leur personnalité, à mi-chemin entre l’enfance et l’adolescence et sans prise de recul par rapport aux choses.

 

Quels conseils donner aux parents pour un bon usage des réseaux sociaux ?

Déjà, les parents doivent rester vigilants, pour repérer les éventuels « signes » qui montrent que leur enfant vit mal les réseaux sociaux : changement de comportement, renfermement, phobie scolaire, etc. Il ne s’agit pas d’être intrusif, mais d’instaurer un dialogue. L’usage des réseaux sociaux n’est pas à bannir, mais il doit être modéré. Par exemple, les parents peuvent demander à leur adolescent de laisser son smartphone dans le salon avant de se coucher, ce qui sera en plus très bénéfique pour son sommeil. Mais à eux également de savoir mettre de côté leur propre appareil : par ce geste, ils donnent l’exemple et montrent qu’ils restent disponibles pour leur enfant.

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