EDUCATION

Quand l’école entre dans l’ère numérique

Les nouvelles technologies se font une place de plus en plus importante dans les établissements scolaires. Mais tous élèves ne sont pas égaux face au numérique.

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Et si les taches d’encre sur les doigts et la poussière des craies faisaient définitivement partie du passé ? Omniprésentes dans la vie de tous les jours, les nouvelles technologies s’imposent de plus en plus dans les établissements scolaires. Les salles informatiques des écoles s’étoffent, les classes s’équipent de vidéoprojecteurs, l’accès aux notes et aux devoirs est digitalisé, les tableaux numériques interactifs (TNI) remplacent les tableaux noirs, collèges et lycées sont raccordés à internet par fibre optique…
Et ce n’est qu’un début. Le ministère de l’Education nationale a bien l’intention de faire une place encore plus grande aux nouvelles technologies. Il y a quelques mois, la première phase d’un grand plan destiné à « faire entrer l’école dans l’ère numérique » a été lancée. Plusieurs services originaux accessibles depuis un ordinateur ont été mis en place, certains spécifiquement à l’attention des parents et des élèves (lire en encadré), d’autres destinés à aider les enseignants dans leur travail de tous les jours. Un portail recensant des centaines de contenus utilisables librement en cours (Eduthèque) et un service destiné à personnaliser l’accompagnement des élèves en difficulté (D’Col) ont été mis à leur disposition. Le ministère a également concocté un dispositif apportant une formation personnalisée en ligne (M@gistère) et attribué un label « Collège numérique » à des établissements intégrant pleinement les outils numériques dans leur enseignement mais aussi dans les relations entre les équipes et les parents. Pour le moment, 23 collèges se sont vu attribuer ce label.
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Des inégalités flagrantes
L’Education nationale compte sur ces initiatives pour inciter plus que jamais les enseignants à intégrer les nouvelles technologies à leurs pratiques pédagogiques. Il souhaite ainsi profiter des atouts du numérique pour rendre les cours plus attractifs, permettre à un maximum d’élèves d’accéder à des contenus adaptés à leur niveau, impliquer encore plus les familles dans l’éducation ou l’orientation de leur enfant, voire même alléger le cartable. De telles initiatives prises au niveau national contribuent aussi à réduire les inégalités face au numérique. Car selon le département où ils habitent et selon l’implication de leurs professeurs, tous les collégiens et lycéens n’ont pas un accès identique aux nouvelles technologies.
Les collégiens des Landes font certainement partie des plus privilégiés de France. Ce département du sud-ouest est l’un des pionniers en matière d’utilisation des nouvelles technologies dans les établissements scolaires.  Tout a commencé il y a 10 ans, lorsque le Conseil général a pris la décision d’offrir un ordinateur portable à chaque élève de sixième. Depuis, les nouvelles technologies n’ont cessé de s’imposer. Au collège départemental de Biscarosse, par exemple, tous les élèves de quatrième ont dans leur emploi du temps une option Culture numérique d’une heure par semaine. Ils apprennent à maîtriser les nouvelles technologies, débattent des opportunités qu’offre Internet mais aussi de ses dangers, acquièrent des méthodes pour créer des sites internet et des blogs, retoucher des photos, monter des vidéos… Les élèves qui le souhaitent peuvent même télécharger une application mobile qui leur permet d’accéder à leurs notes et à la liste de leurs devoirs sur leur smartphone. Si de telles initiatives ont pu voir le jour, c’est parce qu’élèves et collèges bénéficient d’un matériel dernier cri. Chaque classe du collège est ainsi équipée d’ordinateurs, d’un tableau numérique et d’une visionneuse pour projeter des documents à l’écran.
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Des enseignants investis
Mais c’est aussi grâce à la motivation des enseignants, et plus particulièrement de l’un d’entre eux. Stéphane Landeau est un professeur de physique passionné. C’est lui qui a développé l’application mobile sur son temps libre et qui anime l’option Culture numérique. Et son implication ne s’arrête pas là. Il met aussi tous ses cours en ligne sur son blog. Il les accompagne même de questionnaires permettant aux élèves les plus motivés de mieux préparer leurs contrôles. « Il n’y a aucune obligation, explique-t-il, mais les contrôles portant sur des sujets assez proches, ceux qui font ces quizz ont généralement de meilleures notes ». D’ailleurs, dans son collège, la plupart de ses collègues sont sur la même longueur d’onde. « Les enseignants les plus jeunes utilisent pleinement les outils mis à leur disposition, mais je constate que ceux qui enseignent depuis plus longtemps s’y mettent aussi. Que ce soit en langues, en français ou en histoire-géographie, dans notre collège, les nouvelles technologies sont au cœur des apprentissages. Certes on doit parfois gérer des problèmes de débit insuffisant ou se débrouiller lorsque des élèves oublient leur ordinateur ou que celui-ci est en réparation, mais dans l’ensemble, j’ai l’impression que les cours sont plus dynamiques et interactifs, et que l’on parvient mieux à retenir l’attention des élèves, constate Stéphane Landeau. En plus, grâce à l’option Culture numérique, les élèves passent le brevet Internet B2i dès la quatrième. Ils peuvent ainsi se concentrer sur d’autres matières lorsqu’ils arrivent en classe de troisième ».
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La nécessité d’une politique globale
Si le département des Landes est en train de réussir son pari d’intégrer les nouvelles technologies dans l’enseignement, c’est grâce à la politique globale et cohérente mise en place depuis des années. Le Conseil général ne s’est pas contenté de fournir du matériel aux établissements scolaires. Il sensibilise régulièrement les agents sur ce que peuvent leur apporter les nouvelles technologies, charge des équipes sur le terrain d’assurer l’entretien et la mise à jour des équipements, de créer des espaces numériques de travail (ENT) pour les enseignants et les élèves, de développer des services et des logiciels utiles, etc.
Tous les collégiens de France n’ont pas cette chance. Si de plus en plus de communes, de conseils généraux et de conseils régionaux équipent les établissements scolaires en numérique, tous ne mettent pas en place une stratégie globale sur le sujet. Du coup, les belles intentions se heurtent encore trop souvent à la réalité du terrain. Manque d’outils efficaces, formation insuffisante… même les enseignants les plus volontaires doivent retirer les bâtons qu’on leur met dans les roues. Il n’est pas rare qu’ils doivent se battre pour disposer d’une salle informatique en ordre de marche, avec des ordinateurs qui fonctionnent, une connexion à Internet efficace et des logiciels mis à jour. Pour bon nombre d’enseignants, utiliser les outils numériques est souvent synonyme de stress supplémentaire et de surcharge de travail quand ils ne sont pas proclamés d’office « spécialistes en nouvelles technologies » par leurs collègues lorsqu’ils parviennent à faire fonctionner le vidéo-projecteur de l’école, et régulièrement appelés à la rescousse.
Si les intentions sont là et qu’une impulsion est donnée, il faudra encore dépenser beaucoup d’argent et d’énergie pour que l’école numérique devienne une réalité. Reste à savoir combien de temps cela prendra. CB
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REPERES

Englishforschools : l’anglais version ludique

Dans le cadre du plan destiné à « faire entrer l’école dans l’ère numérique » lancé par le ministre de l’Education nationale, Vincent Peillon, le Centre national d’enseignement à distance (Cned) a dévoilé fin octobre le programme English for schools dont l’objectif est d’améliorer l’apprentissage de l’anglais grâce aux nouvelles technologies. Le Cned met à disposition des enseignants du troisième cycle (du CE2 au CM2) des centaines de ressources (des jeux, des animations, des chansons…) qu’ils peuvent utiliser librement en classe afin de les aider à enseigner l’anglais de manière ludique. Depuis l’espace « Teachers », ils peuvent également échanger avec d’autres enseignants, mutualiser leurs pratiques et obtenir des conseils pour intégrer au mieux ces ressources à leurs séances de langues. Le site Englishforschools propose aussi un accès « Kids », à partir duquel les élèves peuvent retrouver  ces contenus, depuis l’ordinateur de l’école ou celui du domicile. Ils peuvent  ainsi réviser les règles de grammaire vues en classe ou apprendre de nouveaux mots de vocabulaire… Evidemment, le service est entièrement gratuit et en accès libre.

www.englishforschools.fr.

Les ordinateurs s’imposent

Le numérique fait plus que jamais partie intégrante de l’environnement des jeunes. 51 % des élèves de 3e passent plus de 3 heures par jour sur Internet et 3 % plus de 10 heures par jour (source MNH/Le Parisien-2010) ! Surfer sur les réseaux sociaux, regarder des vidéos et jouer en ligne sont leurs activités préférées. Face à cet état de fait, l’école tente de suivre le mouvement. A en croire une enquête menée par l’Union européenne sur l’année scolaire 2011-2012, le nombre d’ordinateurs mis à disposition des élèves français est deux fois plus important qu’en 2006. Mais les Européens ne sont pas tous logés à la même enseigne. Avec une moyenne d’un PC pour 8 élèves en primaire, 5 au collège et 3 au lycée, la France se situe légèrement au-dessus de la moyenne, loin toutefois derrière les pays scandinaves.

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ZOOM

Internet au service des parents

Consulter les notes de ses enfants, vérifier ses devoirs à la maison, gérer les absences des enseignants… Le logiciel ProNote est désormais utilisé par de nombreux parents qui ont des enfants dans le secondaire. Mais depuis la rentrée 2013, des services complémentaires sont disponibles.

Grâce à Prép’Exam (1), parents et élèves ont désormais accès en ligne aux annales du bac. Avec Total accès (2), ils peuvent télécharger une application mobile pour accéder, sur leur smartphone, à des informations sur l’orientation. Le site Internet Masecondechance.fr aide les parents à trouver des solutions d’orientation pour les jeunes en situation de décrochage et le site Lire au CP (3) leur permet de découvrir, par le biais d’un  webdocumentaire, ce que fait leur enfant au cours de sa première année à l’école élémentaire. Des films d’animation de 2 minutes destinés à expliquer de manière ludique des notions de français, de mathématiques ou de sciences aux élèves de primaire seront aussi prochainement disponibles (Les Fondamentaux).

Notes

1 – http://eduscol.education.fr/prep-exam

2 – http://mobile.onisep.fr/totalacces

3 – http://www.cndp.fr/lire-au-cp/

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