EDUCATION

Réforme du lycée : ce qui va changer à la rentrée

HD-406---nouveau-lycee-SIPAAprès la classe de seconde l’année dernière et avant celle de terminale l’an prochain, c’est au tour de la classe de première d’intégrer les mesures de la réforme du lycée et du baccalauréat. A la rentrée 2019, les changements y seront nombreux.

 

 

Lancée au début de l’année 2018 à l’initiative du ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, la réforme du lycée et du baccalauréat entre aujourd’hui dans sa deuxième phase. Après quelques ajustements sur la classe de seconde, les modifications concernent cette fois la classe de première. Et elles sont radicales. Le changement le plus visible concerne les filières. Jusque-là, à leur entrée en première, les élèves de la voie générale avaient le choix entre trois filières : S pour les scientifiques, ES – série économique et sociale – et L pour les littéraires. Grâce aux options, chacun pouvait adapter à la marge son parcours. A partir de la rentrée prochaine, ces filières disparaissent. A la place, tous les élèves de première générale suivront un tronc commun qui sera composé de six matières : Français (4 h), Histoire-Géographie (3 h), Langues étrangères (4 h 30), Enseignement moral et civique (30 minutes), Education physique et sportive (2 h) et Enseignement scientifique (2 h).

A côté de ce tronc commun, chaque élève de la filière générale devra personnaliser son parcours, bien plus qu’il ne le faisait jusque-là. Chacun suivra en effet trois enseignements de spécialité, qu’il aura choisis en fin de seconde (lire en encadré). Un choix à faire parmi 12 enseignements – en théorie, car la grande majorité des lycées n’en proposeront dans les faits que 7 à 8 en moyenne. Chacune de ces 3 spécialités choisies fera l’objet de 4 heures d’enseignement hebdomadaires. A la fin de l’année de première, l’élève devra sélectionner parmi ces spécialités les deux qu’il souhaite poursuivre en terminale. Dans le cas où le projet de l’élève aurait évolué ou si une spécialité ne lui convenait pas, il pourra opter pour un nouvel enseignement de spécialité au moment de son passage en terminale. Cette bascule ne pourra toutefois se faire que de manière « très exceptionnelle » et « avec l’avis du conseil de classe et des responsables légaux ».

Au final, les élèves de la filière générale suivront 28 heures de cours obligatoires par semaine, auxquelles peut s’ajouter une option à choisir entre une troisième langue étrangère, un enseignement artistique, de l’Education physique et sportive (EPS) et une option Langues et culture de l’Antiquité regroupant les enseignements de latin et de grec. Enfin, 54 heures annuelles seront réservées à l’orientation.

 

HD-406---nouveau-lycee-AFPUn choix un peu contraint

Si, en théorie, le choix des spécialités est libre, dans la pratique, on constate que la majorité des élèves ont encore tendance à reproduire les combinaisons qui avaient cours dans les précédentes filières. La plupart, en effet, ont associé des spécialités spécifiquement scientifiques ou littéraires. Certains ont bien tenté de sortir des sentiers battus, mais ils n’ont pas toujours pu obtenir la combinaison qu’ils avaient demandée, soit parce que leur établissement ne proposait pas l’une des spécialités souhaitées, soit parce que l’effectif maximal était atteint, soit enfin parce que la combinaison ne pouvait pas s’intégrer à l’emploi du temps du lycée. Chaque année, des élèves risquent donc de devoir renoncer à leurs choix, sauf à trouver un autre établissement capable de les satisfaire.

 

Les mathématiques au centre des inquiétudes

De ce système de spécialités découlent plusieurs petites révolutions. L’une d’elles concerne la philosophie : les élèves qui le souhaitent pourront désormais aborder cette matière dès la classe de première en optant pour le module Humanités, littérature et philosophie. Jusque-là, elle n’était enseignée qu’en terminale.

Mais le plus gros changement concerne les mathématiques. Tous les élèves de première continueront à en faire dans le tronc commun, mais elles seront désormais noyées au sein d’un « enseignement scientifique » de 2 heures hebdomadaires au cours duquel seront également abordées les Sciences physiques et les Sciences de la vie et de la terre. Plutôt que d’apprendre les notions mathématiques, cette nouvelle matière aura pour mission de donner à tous les élèves les bases d’une démarche scientifique. Ainsi, pendant ces cours seront étudiées des notions comme les statistiques ou les marges d’erreur, mais aussi des concepts plus larges comme la transition numérique et écologique, la bioéthique ou l’intelligence artificielle.

Les élèves qui souhaitent se lancer dans une carrière scientifique auront donc tout intérêt à opter pour la spécialité Mathématiques que tous les lycées proposent et dont le programme s’annonce particulièrement exigeant. Pour autant, ce choix n’est pas complètement définitif. Ceux qui se rendront compte qu’ils ont du mal à suivre le rythme pourront décider d’abandonner cette spécialité en fin de première. Ils pourront, s’ils le souhaitent, choisir à la place une « option mathématiques » de 3 heures hebdomadaires, moins exigeante que la spécialité mathématiques, qui viendra s’ajouter aux deux autres spécialités conservées. Cette option sera aussi ouverte à ceux qui n’avaient pas pris la spécialisation mathématiques en première, mais qui souhaiteraient reprendre cette matière en terminale. Le ministère de l’Education nationale précise toutefois que pour eux, « une remise à niveau sera nécessaire ». À l’inverse, les élèves ayant un goût affirmé pour cette matière, non seulement garderont la spécialité mathématiques en terminale, mais pourront prendre en plus une option « mathématiques expertes » qui viendra s’ajouter à leur emploi du temps, portant ainsi à 9 heures le temps d’enseignement hebdomadaire des mathématiques, contre 8 heures actuellement en terminale S.

 

HD-406---nouveau-lycee-SIPA 2Le bac commence en première

Le dernier grand changement concerne les évaluations pour le bac. Comme c’était le cas jusque-là, des épreuves anticipées de Français seront organisées en fin de première. Une épreuve écrite et un oral sont prévus. Mais, dans le cadre du bac nouvelle formule, les élèves de première seront également évalués sur l’enseignement de spécialité qu’ils auront choisi de ne pas poursuivre en terminale.

Les deux autres enseignements de spécialité seront quant à eux évalués en fin de terminale par le biais d’épreuves écrites, mais pas seulement. Ils feront aussi l’objet d’un grand oral que les candidats soutiendront en fin de terminale et au cours duquel ils devront présenter un projet mêlant les 2 enseignements, un projet si ambitieux que les lycéens devront commencer à travailler dessus dès la classe de première sous la tutelle des enseignants concernés, même si aucun horaire spécifique ne lui sera assigné cette année-là.

Outre ces deux épreuves écrites et cet oral, une seule autre épreuve, celle de philosophie, sera organisée en fin de terminale. Ces notes compteront pour 60 % de la note finale. Les autres matières, quant à elles, seront évaluées dans le cadre du contrôle continu, 10 % par la prise en compte de l’ensemble des bulletins de première et de terminale et 30 % par le biais d’épreuves communes organisées dans les établissements au cours des deux dernières années du lycée. Une méthode censée limiter le bachotage, et qui devrait ainsi inciter les élèves à travailler très régulièrement dès la classe de première.

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itw-406---Pascal_BollorePOINT DE VUE

Pascal Bolloré, proviseur du lycée Berthelot de Saint-Maur des Fossés (94) et secrétaire général adjoint du Syndicat national des personnels de direction (SNPDEN)

« Nous faisons tout pour répondre aux demandes de nos élèves »

« La réforme, complexe et profonde, génère logiquement de nombreuses interrogations parmi les personnels de direction qui se demandent notamment s’ils pourront faire tenir dans l’emploi du temps l’ensemble des combinaisons demandées par leurs élèves. Dans mon lycée, nous avons demandé dès octobre aux élèves de se prononcer sur les spécialités qu’ils envisageaient de suivre. A partir de cet état des lieux, nous avons commencé très tôt à travailler avec le rectorat. La spécialité « numérique » a notamment été ouverte car 17 élèves nous avaient fait part de leur souhait de suivre cette spécialité. Au final, tout se passe plutôt dans de bonnes conditions.

Dans l’ensemble, les demandes des élèves sont plutôt sensées et quand des combinaisons de spécialités un peu moins classiques sont demandées, nous faisons tout pour les mettre en œuvre dans la mesure où elles s’intègrent au projet de l’élève. Au final, un seul élève ne devrait pas pouvoir suivre les 3 spécialités qu’il a choisies. Nous allons voir avec lui et ses parents ce qu’il est possible de faire. Il est encore trop tôt pour faire un bilan précis de cette réforme, mais il semble que pour l’instant, elle se mette en place en bonne intelligence. »

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ZOOM

Les enseignements de spécialité

Avant d’entrer en première, l’élève doit choisir 3 enseignements de spécialité parmi les 12 suivants :

  • Arts
  • Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques
  • Humanités, littérature et philosophie
  • Littérature, langues et cultures de l’Antiquité
  • Langues, littératures et cultures étrangères
  • Mathématiques
  • Numérique et sciences informatiques
  • Sciences de la vie et de la Terre
  • Sciences de l’ingénieur
  • Sciences économiques et sociales
  • Physique-chimie
  • Biologie écologie (en lycée agricole).

A noter que l’Onisep a mis en ligne www.horizons2021.fr, qui permet de découvrir ces nouveaux enseignements de spécialité et de tester la compatibilité de ses choix d’orientation.

 

map_specCi-contre, la carte des spécialités par lycée. Cliquez sur la carte pour découvrir l’offre de chaque établissement.

 

 

 

 

 

 

 

 

Des changements aussi dans les filières technologiques et professionnelles

La voie générale n’est pas la seule à être touchée par la réforme du lycée. A partir de l’année prochaine, les élèves de la voie technologique suivront eux aussi un tronc commun et des spécialités au nombre de 3 en classe de première puis 2 autres en terminale. 

Les élèves qui entreront en seconde professionnelle à partir de la rentrée prochaine devront quant à eux choisir une famille de métiers parmi plusieurs regroupant des compétences professionnelles communes. L’année suivante, ils devront faire un autre choix important : opter soit pour l’apprentissage, soit pour la voie scolaire. Contrairement à ce qui se passe aujourd’hui, tous les élèves devraient avoir l’opportunité de faire ce choix, quel que soit leur établissement, promet le ministère. En classe de terminale, ils devront aussi choisir entre s’insérer dans la vie professionnelle ou l’entrepreneuriat ou bien poursuivre leurs études. Dans les deux cas, le suivi d’un module spécifique sera obligatoire.

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Les habitudes ont la vie dure

A en croire une enquête du syndicat d’enseignants SNES-FSU menée au début de l’année, chaque lycée aurait reçu en moyenne 54 demandes de combinaisons différentes. Une diversité qui n’est toutefois qu’apparente. En effet, seules 10 triplettes sur ces 54 auraient été choisies par au moins 10 élèves. Elles accueilleraient à elles seules 68 % des élèves. Les 44 autres triplettes n’accueilleraient chacune pas plus de 3 élèves. Et, comme auparavant, la filière scientifique a toujours autant la cote. La triplette scientifique Mathématiques/Physique-Chimie/SVT aurait été choisie par un élève sur quatre, principalement par les meilleurs élèves.

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