EDUCATION

Baccalauréat : la réforme est lancée !

HD-399---bac-3-SIPADans 3 ans, le baccalauréat général devrait changer de visage. En diminuant le nombre d’épreuves finales et en renforçant le contrôle continu, le gouvernement entend adapter cet examen aux enjeux actuels.

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La fin du bac général tel qu’on le connaît est actée (1). D’ici 2021, les lycéens passeront un examen totalement remanié pour tenter de décrocher le précieux sésame. L’annonce a été faite au mois de novembre par le Premier ministre Edouard Philippe, répondant ainsi à une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Le processus a débuté par une grande consultation menée par l’ancien universitaire Pierre Mathiot. Celle-ci devait permettre à tous les acteurs de la communauté éducative de donner leur avis sur ce que devait être le futur bac. Des enseignants, des chercheurs, des spécialistes de l’Education, des syndicats et bien sûr des associations de parents d’élèves, dont la PEEP, ont pu exposer leur point de vue. Au total, plus de 70 entretiens ont été réalisés. Les lycéens aussi ont pu s’exprimer sur le sujet par le biais d’une plateforme en ligne ouverte pendant quelques jours au mois de décembre.

Les conclusions de cette consultation ont été remises au mois de janvier au ministre de l’Education nationale (voir ICI le rapport dans son intégralité). Les détails de la réforme seront dévoilés en février pour un début de mise en œuvre dès la rentrée scolaire 2018.

Le principal changement concerne le nombre d’épreuves finales qui pourrait se limiter à quatre, contre une quinzaine aujourd’hui. Les élèves devraient notamment passer deux épreuves « majeures » qui varieront en fonction de la filière  ainsi qu’une épreuve de philosophie. Chaque candidat devrait également se soumettre à un « grand oral » pluridisciplinaire qui reprendrait le contenu des enseignements de première et de terminale et qui serait présenté devant un jury composé d’enseignants mais aussi de personnalités extérieures au monde scolaire. L’épreuve de français continuerait à être passée en fin de première. Les matières qui ne seront pas soumises à une épreuve finale feront quant à elles l’objet d’un contrôle continu durant l’année de terminale.

Avec ce bac nouvelle formule, le ministère veut d’une part en finir avec le bachotage. Aujourd’hui, la plupart des candidats se plongent dans les révisions dans les toutes dernières semaines précédant le début des épreuves. Avec le renforcement du contrôle continu, ils devront étaler leur travail tout au long de l’année. Le nouveau bac aura d’autre part l’avantage d’être plus simple à organiser. Moins d’épreuves, c’est moins de sujets à élaborer, moins d’enseignants à mobiliser pour surveiller les épreuves et corriger les copies, moins de salles à réquisitionner… C’est aussi moins de risque d’erreur et de vol de sujet, et des coûts réduits. Cette nouvelle organisation devrait par ailleurs permettre aux élèves des autres classes de travailler enfin jusqu’à la fin de l’année. Aujourd’hui, chaque élève perd plusieurs semaines de scolarité à cause de l’organisation du bac.

 

Des épreuves plus tôt dans l’année

L’autre changement important concerne la date des épreuves finales. Si la philosophie et le grand oral devraient avoir lieu au mois de juin, les épreuves « majeures » pourraient être organisées à la fin du deuxième trimestre. Cette anticipation permettrait d’une part aux élèves de mieux étaler leurs révisions, mais aurait surtout l’avantage de faire en sorte que les notes obtenues dans ces matières importantes soient prises en compte dans la procédure d’orientation. Le dernier trimestre de terminale pourrait ainsi être mis à profit pour préparer les élèves à ce qui les attend dans leurs études supérieures. Car au-delà même de l’organisation des épreuves, le gouvernement souhaite changer la raison d’être du baccalauréat, un diplôme national créé en 1808 sous Napoléon. Alors que l’examen d’aujourd’hui se contente de vérifier que les connaissances apprises tout au long du secondaire sont bien acquises, celui de demain devra surtout s’assurer que chaque élève dispose des bases nécessaires pour poursuivre ses études dans le supérieur. Il devra notamment vérifier que l’élève dispose des « attendus » mis en place à l’entrée à l’université pour intégrer certaines filières.

 

HD-399---bac-1-SIPALes filières actuelles dans le collimateur

Si les grandes lignes de la réforme sont d’ores et déjà tracées, bon nombre de détails restent encore à régler. Par exemple, on ne sait toujours pas avec certitude quel sort sera réservé aux filières actuelles. Il ne fait aucun doute que les filières L, ES et S ne sont pas suffisamment identifiées et que le choix d’une filière dépend plus du niveau général des élèves que de son véritable projet professionnel. Alors qu’elle est censée préparer aux études scientifiques, la filière S attire aujourd’hui les élèves considérés comme les « meilleurs » sur le plan académique. Trop souvent, la filière ES, elle, accueille  moins des élèves attirés par l’économie que des lycéens qui n’avaient pas un niveau suffisant pour aller en S. Quant à la filière L, elle a toujours du mal à séduire les élèves, notamment à cause de ses débouchés limités. Dans une interview au journal Le Parisien, le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer a expliqué que la disparition des filières actuelles « était une option parmi bien d’autres ».

Il reste aussi à identifier les matières qui feront demain l’objet d’une épreuve finale, fixer un coefficient à chacune d’entre elles et déterminer si elles seront imposées aux candidats ou bien si certaines d’entre elles pourront être choisies. Les discussions risquent d’être soutenues, certains syndicats d’enseignants pouvant chercher à peser de tout leur poids pour favoriser leur matière plutôt qu’une autre. Une autre réflexion doit être engagée sur les options, l’idée étant de faire en sorte qu’un élève ne puisse plus décrocher son bac ou une mention grâce à des options qui n’ont rien à voir avec sa filière, ainsi que sur les modalités d’organisation du « grand oral » (il faut fixer sa durée, les contenus sur lesquels les candidats seront évalués, la composition précise du jury, etc.).

 

HD-399---bac-2Veiller à ne pas créer des inégalités

L’autre point important à régler concerne l’évaluation des matières faisant l’objet d’un contrôle continu. Il faut notamment déterminer si les notes seront attribuées par les enseignants qui auront dispensé les cours tout au long de l’année ou bien si des contrôles anonymes seront organisés. Dans tous les cas de figure, Il faudra que des mesures soient prises pour éviter que le contrôle continu ne soit source d’inégalités. Selon qu’un établissement ou un enseignant note plus ou moins sévèrement, des candidats pourraient en effet avoir plus de mal que d’autres à décrocher leur diplôme. Le risque serait alors grand que la valeur du bac ne soit pas la même aux yeux des écoles et des recruteurs selon l’établissement où il a été passé.

Enfin, il faudra déterminer précisément à quoi servira le troisième trimestre. Ce temps pourrait notamment être mis à profit pour proposer aux élèves des modules de compétences, volontaires ou obligatoires, qui leur permettraient de découvrir des matières qu’ils n’ont encore jamais abordées. Ceux qui envisagent de faire un métier d’avocat ou de magistrat pourraient ainsi être sensibilisés au droit, par exemple. Ce dernier trimestre pourrait également être utilisé pour préparer les bacheliers aux méthodes pédagogiques de l’enseignement supérieur. Des modules pourraient permettre de renforcer le travail en autonomie des élèves, les préparer aux cours en amphi ou les aider à la prise de notes. Les débats risquent d’être passionnés.

 

Note

1 – La réforme des bacs technologiques et des bacs professionnels est prévue ultérieurement.

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ZOOM

Un calendrier serré

3 ans, cela semble loin. Et pourtant, les premiers effets de la réforme se feront sentir dès la rentrée prochaine.

  • Jusqu’à janvier 2018 : consultation de la communauté éducative
  • Janvier 2018 : remise des conclusions au ministre de l’Education nationale
  • Février 2018 : dévoilement des contours de la réforme
  • Septembre 2018 : Lancement de la réforme en classe de seconde
  • Septembre 2019 : Lancement de la réforme en classe de première
  • Septembre 2020 : Lancement de la réforme en classe de terminale
  • Juin 2021 : première session du bac nouvelle formule

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itw-399---cywiePOINT DE VUE

Samuel Cywie, membre du conseil d’administration, porte-parole et représentant de la PEEP à la consultation sur la réforme du baccalauréat

« Le baccalauréat doit rester ce qu’il a toujours été, à savoir un examen national de fin de secondaire et un premier grade universitaire. Mais il ne fait aucun doute qu’il faut le réformer pour le rendre plus simple à organiser et l’adapter aux enjeux d’aujourd’hui. A la PEEP, nous proposons notamment que chaque élève puisse choisir de passer trois épreuves majeures en plus du français, en fonction de ses goûts, de ses talents et de son projet. Nous sommes en revanche réservés quant à l’idée d’un grand oral. Son coefficient devra dans tous les cas rester assez faible car nous savons que ce type d’épreuve a tendance à renforcer les inégalités sociales.

Par ailleurs, pour que les élèves soient mieux préparés à ce qui les attend dans le supérieur, nous sommes favorables à ce que les épreuves majeures aient lieu plus tôt dans l’année et que des modules de spécialisation soient proposés aux élèves durant le dernier trimestre. La suppression des enseignements d’exploration de seconde pourrait dégager les moyens nécessaires pour mettre en place ces enseignements. Si le maintien d’une base solide en français et en mathématiques est indispensable quel que soit le cursus choisi, il nous semble important de valoriser les différentes filières et les rendre plus identifiables. La filière scientifique, notamment, doit être musclée. »

 

Pour en savoir plus, retrouvez ICI l’ensemble des propositions de la Peep pour l’évolution du bac général, déclinées en quatre grands points : les filières de l’enseignement général, l’acquisition des compétences, l’enseignement des langues vivantes, et enfin l’encadrement et l’orientation ; des propositions complétées par plusieurs points de vigilance.

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REPERES

Des parents majoritairement favorables à la réforme

Politiques, enseignants, spécialistes… tout le monde est d’accord sur la nécessité de réformer le baccalauréat. C’est le cas aussi de la majorité des parents. Selon une enquête réalisée par la PEEP (1), 62 % d’entre eux estiment que le bac ne répond plus aux besoins des jeunes et la moitié trouvent que les filières L, ES et S ne sont plus adaptées. Pour les trois quarts des répondants, le nombre d’épreuves passées est trop important et favorise le bachotage. 85 % sont favorables à un contrôle continu pour certaines matières. Un raz-de-marée ! Un tiers de ceux-ci conditionnent toutefois ce changement à la mise en place de mesures destinées à corriger les éventuelles différences de notation entre établissements et entre professeurs.

Autre point notable, les deux tiers des parents se disent favorables à la mise en place d’un cursus commun et la possibilité pour l’élève de choisir entre trois épreuves « majeures » en plus du français. Enfin, 63 % des parents souhaitent que les notes obtenues aux épreuves soient prises en compte dans la méthode d’affectation post-bac. Vue la direction prise, même si beaucoup de points restent encore dans l’inconnu, une grande partie de leurs souhaits pourraient être réalisés.

 

1 – Enquête réalisée sur la base de 6.812 réponses à un questionnaire diffusé entre le 15 et le 20 novembre auprès des adhérents de la PEEP.

 

 

… et qui soutiennent majoritairement les nouveaux parcours proposés en remplacement des séries actuelles !

La Fédération PEEP a consulté ses adhérents sur les propositions du rapport Mathiot (à découvrir en cliquant sur l’image ci-dessous), fin janvier. 

Capture d’écran 2018-02-02 à 15.04.02

Près de de 5 000 réponses ont été recueillies. Lire les résultats de ce questionnaire ci-dessous :

rapport mathiot peep

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